jeudi 4 mai 2006

43° Vous avez dit « Droit du Travail ?


" La liberté de penser s’arrête là où commence le code du travail "

Laurence Parisot, Présidente du Medef.


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C’est par cette forte déclaration que la nouvelle présidente du Medef a fait connaître, peu de temps après son élection, sa manière d’appréhender le sujet. Ce qui a permis à nombre de commentateurs de dire qu’on avait abandonné un baron pour une poissonnière du marché, et qu’il n’était pas sûr qu’on avait fait une bonne affaire… (nb : je n’ai rien contre les poissonnières du marché, mais je ne suis pas l’auteur de cette expression !)

Dans la même foulée, elle suggérait une fois pour toute de supprimer l’usage du mot « licenciement » pour le remplacer par « séparabilité ». Les « techniciens de surface » auraient à donner un bon coup « d’instrument technique de balayage » dans le vocabulaire. Il n’y a déjà plus de chômeurs, maintenant plus de licenciés, bientôt plus de Code du Travail. Et le mot «entrepreneur » qu’on a déjà substitué au mot « patron », on le garde, camarades ?

Le Canard Enchaîné d’hier nous apprend que Madame Parisot a envoyé une lettre à Gérard Larcher, Ministre délégué à l’emploi, lui demandant de froisser purement et simplement son projet d’extension du corps des inspecteurs du travail de 1300 à 2000 membres à l’horizon 2010. D’après elle, il vaudrait mieux remplacer ce « système de contrôle et de sanctions » qu’elle trouve « peu pertinent » par un « dialogue approfondi avec les entreprises ».

Moi, j’ai essayé de dialoguer avec une entreprise de pourtant bonne réputation qui m’a employé pendant 25 ans avant de me trouver trop vieux à trois ans de la retraite et de me pousser vers la sortie avec peu de ménagements. La conversation est très difficile, vous savez, surtout si on essaie « d’approfondir ». En fait, notre prochain entretien de « concertation » va se dérouler la semaine prochaine devant la Cour d’Appel de Paris siégeant en matière prudhommale. Alors, dialoguer avec les entreprises, moi, j’ai déjà donné.

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Ce midi, Laurence Parisot vient d’en remettre une couche en déclarant que l’appartenance syndicale de certains des dits inspecteurs aurait une influence néfaste sur leur objectivité. Ce qui me paraît une atteinte éhontée au droit syndical d’une part, et d’autre part à la conscience professionnelle et l’intégrité de fonctionnaires dont l’objectivité est par ailleurs peu sollicitée par leur fonction puisqu’il s’agit pour eux de constater le respect ou le non-respect du code du travail et des conventions collectives qui sont écrits noir sur blanc. On n’interprète pas un article de loi : il est appliqué ou il ne l’est pas. L’objectivité est là. Si le Medef attend autre chose de ce digne corps de fonctionnaires, cet autre chose ne peut être que hors du cadre réglementaire….

Les syndicats ont également à se plaindre de pareille déclaration : on les accuse de fausser la conscience professionnelle d’honnêtes fonctionnaires. Mais le Medef n’est-il pas, lui aussi, un syndicat ? Par quel privilège serait-il protégé des dérives dont il accuse les autres ? C’est ça l’objectivité demandée ???

J’espère et je souhaite que ni les Inspecteurs du Travail ni les syndicats ne se laissent malmener et bafouer de la sorte. A leur place, je m’estimerais diffamé.

Pour atteindre un ennemi, il ne faut pas faire des moulinets dans le vide n’importe comment. Il faut frapper une fois, une seule bonne fois, au bon endroit et au bon moment. C’est le moment.

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