mardi 12 avril 2016

533° Nuit Debout...






La Nuit Debout a maintenant un site:


http://www.nuitdebout.fr/



Le mouvement « Nuit Debout » suscite des réactions tout à fait passionnantes. Et ce n'est qu'un début.

A moins d’être de mauvaise foi, comme l'est bien volontiers la presse de province qui y voit des éruptions du genre « le crépuscule des bobos », force est de constater que ce mouvement répond à une préoccupation majeure des Français dont on a tort de ne pas tirer les conséquences : près de 80 % des Français ne veulent plus ni de François Hollande, ni de Nicolas Sarkozy, ni de Marine LePen. 



C'est dire que l'enjeu est de taille : l'échiquier politique s'agrandit d'un terrain à bâtir d'urgence, et ça ne plaît pas à ceux qui ont une belle maison de l'autre côté de la rue.

Surtout lorsqu'ils constatent que pareilles réunions spontanées ont généré Syriza en Grèce et Podemos en Espagne, et que cela nuit considérablement à « leur » establishment..…

On imagine l'inquiétude que suscite pareille créativité dans un pays où la politique, au lieu d'être un mandat d'intérêt public, est devenue une carrière, quand ce n'est pas un fond de commerce qu'on se transmet de père en fils. (ou en fille...) Quand le chômage les menace, nos hommes politiques n'ont pas les mêmes réactions que quand il s'abat sur le bon peuple.

Il y a ceux qui se croient des « cerveaux nécessaires » à la conduite du pays et ne voient pas d'un bon œil que les braves gens prétendent réfléchir tous seuls.

Valls ne sait pas trop comment gérer la patate chaude et empêcher la tache d'huile de s'étendre. Il voudrait acheter « les jeunes » avec quelques petits cadeaux, tentant ainsi de les traiter à part pour les dissocier du reste de la population.

Dure leçon : Les jeunes lui rappellent durement qu'ils font partie de la population, qu'ils constituent même celle de demain, qu'ils ne sont pas à vendre, qu'ils prennent les aumônes qui leur sont faites comme des choses dues depuis longtemps, mais que ce n'est pas cela qui va les faire renoncer à l'éradication de la loi Khomri et les dissuader d'aller refaire le monde place de la République.

Et sans avoir besoin de tendre l'autre joue, Valls se la fait claquer par Gattaz qui répète qu'il en a marre de payer des taxes et que si le gouvernement a encore des cadeaux à faire, c'est à sa clique patronale qu'il doit les prodiguer.

Fillon, sans doute ulcéré de voir des gens bâtir un programme nouveau alors que lui n'en a pas d'autre que de prôner inlassablement le conservatisme et les vertus de la marche arrière, déclare au journal Le Monde que toute ces rassemblements le choquent, surtout en plein état d'urgence.

Ce qui le contrarie, en réalité, c'est surtout que « Nuit Debout » ait des idées neuves alors que lui ne fait que photocopier un évangile bourgeois désespérément obsolète….


Si vous pensiez que Bruno Le Maire est moins conservateur que François Fillon, vous voilà détrompé : aussi soucieux que son concurrent aux primaires de ne pas voir les gens penser tous seuls, il se déclare, sur France Inter, opposé à une « dictature de la minorité ».

Il oublie trop vite que la minorité, c'est lui : 80 % des Français ne veut plus entendre parler de son parti ! Ah, la communication…



Nathalie Kosciusco Morizet est plus hypocrite, qui comprenant qu'elle ne peut ni étouffer ni approuver Nuit Debout, déclare qu'il faut écouter la place de la République, et éventuellement faire avec.
Coutumière de la politique de l'anguille, elle s'était déjà abstenue lors du vote sur le mariage pour tous à l'Assemblée. Elle continue à jouer l'insaisissable, pensant sans doute pouvoir tirer des marrons du feu lorsque les autres les auront cuisinés.
Le monde politique compte de plus en plus de ces édiles opportunistes à convictions variables, qui attendent que les trains se mettent à rouler pour monter à coup sûr dans celui qui va dans le sens de l'histoire.



Macron, lui, tente d'allumer un contre-feu avec son « En marche » qui se voudrait une version «organisée» de la spontanéité populaire de la place de la République. C'est sans nul doute le moins malhabile de tous, mais cela reste caricatural.

 La force de Nuit Debout est justement de ne pas être un parti, et de se trouver de manière si naturelle au-dessus des partis qu'elle acquiert par là même une crédibilité nouvelle. Macron l'a bien compris qui se répand en slogans d'avertissement : « ni de gauche ni de droite» et « nous ne sommes pas un parti ».
C'est dire qu'il  a déjà compris que faute de le rabâcher, -et même en le rabâchant d'ailleurs -, il n'arrivera pas à hisser son machin assez haut au-dessus de la mêlée pour être regardé comme un vrai sursaut populaire.

La ville de Paris ne sait trop sur quel pied danser. Son adjointe à la sécurité, Colombe Brossel voulait porter plainte pour dégradations parce que deux dalles de la place avaient été descellées pour faire place à un potager. Anne Hidalgo a calmé le jeu en affirmant qu'on n'allait pas faire tant de salades pour un potager. Elle aussi, attend pour être sûre de se trouver du côté du manche.


On notera au passage la perfidie du Figaro, qui tente de jeter de l'huile sur le feu en titrant « la ville de Paris veut porter plainte » alorsqu'il faut lire son article quasiment jusqu'en bas pour découvrir que, si elle y a pensé, elle n'en a en réalité nullement l'intention…
Journalisme, vous avez dit « journalisme » ?


En attendant, les forces de l'ordre effacent presque tous les matins les traces de la nuit, ce qui ne fait que réaffirmer la volonté des manifestants à se réinstaller chaque soir. Oui, le pouvoir a bien compris qu’il y a là le ferment d'une insurrection, mais les moins cons d'entre eux ont également compris qu'un geste trop brusque pourrait justement mettre le feu aux poudres à un moment on on espère encore voir les choses s'autogérer, voire rester récupérables.




Et les LGBT ?


Je vois aussi des chroniques comme celles-ci sur Yagg, qui se plaignent de ce que les LGBT ne soient pas assez présents place de la République. Mais quand on lit l'article, on comprend vite l'aigreur qui ronge son auteur. Que les LGBT soient présents à Nuit Debout, c'est bien évidemment nécessaire, -et sans doute y sont-ils déjà-, mais ils ne doivent s'y trouver qu'en tant que citoyens soucieux de bâtir une société plus juste.

S'ils veulent y installer une estrade pour faire avancer nos droits spécifiques, ils se trompent d'endroit..

Les LGBT trouveront une place naturelle dans une société avancée et humaniste comme celle que les acteurs de Nuit Debout tentent de concevoir. Il est donc de leur intérêt d'y participer non pas comme activistes spécialisés mais en tant que citoyens fondateurs.

La Nuit Debout est et doit rester un centre de l'union, une convergence des luttes, une athanor où fusionne le pur métal d'un monde nouveau, équitable et humaniste. Elle ne peut remplir ce rôle que si aucun bateleur ne vient la prendre pour un champ de foire où il pourrait dresser ses tréteaux.
Et elle se méfie à juste titre des tentatives de récupération.

La force de Nuit Debout réside justement dans sa spontanéité, dans son caractère immanent et sa liberté absolue de création.




Dernière minute: 

  
La Police jette la soupe de Nuit Debout au caniveau!




Aux dernières nouvelles, la police a dévasté la cantine de Nuit Debout ce mardi 12 avril au matin, pensant ainsi dissuader les citoyens de s'installer durablement…

C'est à ce genre de maladresse que l'on vérifie que la société a plus que jamais besoin d'une refondation !










 





vendredi 8 avril 2016

532° Du surréalisme en politique...





Lorsque j'ai entendu le petit Macron annoncer la création de son mouvement, « EN MARCHE » « qui n'est pas un parti » et qui prétend porter des idées « hors clivage gauche-droite des partis traditionnels », mon sang n'a fait qu'un tour.

J'ai affûté mes phrases les plus assassines, mes remarques les plus acides, mes arguments les plus tranchants pour abattre sitôt sortie du nid une si redoutable imposture.

D'abord, on nous a déjà fait le coup. Sans parler d'Edgar Faure, je rappelle que tous ceux qui ont déjà essayé de mélanger les cartes et de nous embrouiller l'échiquier idéologique de cette manière ont abouti à un double résultat : d'une part ils ont été lourdement battus, et d'autre part, ils se sont à l'usage, révélés d'hypocrites droitistes.

D'abord, Lecanuet… Qui se souvient de sa vie et de son œuvre ? Ensuite, c'est Bayrou et son Modem qui n'ont jamais obtenu de résultats électoraux à la hauteur de « leur innovation », et qu'on a surpris à voter plus de 90 % des lois de droite lorsque, d'aventure, ils ont eu des députés.

Le second, c'est Sarkozy qui a débarqué à la foutraque avec des discours de cet acabit. Enfin, quand ça l'arrangeait, puisqu’après nous avoir bassiné avec le « gauche droite c'est dépassé » pendant sa campagne présidentielle de 2007, il dérapait fortement vers l'extrême-droite vers la fin de son quinquennat, sous l'influence de Patrick Buisson.
 



Position qu'il a manifestement maintenue, puisque pour affronter les municipales de 2015, il désignait à nouveau la gauche comme un adversaire à battre pour la droite. Les chiens ne font pas des chats.

«Voter Front national au premier tour, c'est faire gagner la gauche second. »

Mais ce bonimenteur de foire change encore son discours pour préparer sa campagne pour les primaires puisqu'il prétend à nouveau s'élever au-dessus des partis...

Sans doute imagine-t-il que ce ne sont pas les mêmes Français qui l'entendent lorsqu'il prépare des municipales et lorsqu'il se présente à des primaires...

Bref, Sarkozy est un très bel exemple de travestissement politique : quand on est trop à droite, on feint d'ignorer ce que sont la gauche et la droite.


Pour en revenir à notre Macron, je vous disais que j'avais bondi en entendant son imposture.

Fondement de notre République, la gauche et la droite datent de l'assemblée constituante de 1789.


Les diverses définitions qui en ont été données ne laissent aucune place au mélange des genres.

Mes deux préférées sont :

« La gauche, c'est au nom du peuple, la droite c'est au nom du fric ».
et
« Être de gauche, c'est se poser des questions auxquelles on n'a pas de réponse, et être de droite, c'est prétendre apporter des réponses à des questions qu'on ne veut pas se poser. »

Bref, toute tentative de se soustraire à ce cas de figure nie l'évidence. Le pouvoir du fric ne cessera jamais d’exister, et la seule chose crédible à lui opposer est le pouvoir du peuple. L'économie est un outil au service de l'homme, et non l'inverse.



Alors, vouloir abolir le clivage gauche droite, ou comme les plus arrogants, prétendre léviter au-dessus, user de ce discours de « tout le monde il est beau tout le monde il est gentil » est un boniment de foire, et j'en veux autant à ceux qui les prononcent qu'aux journalistes qui les développent et les analysent à qui mieux-mieux. 

Quant à ceux qui y croient, je me contente de les plaindre, comme je plains tous les gens qui « croient ».

Non mais allô quoi, écoutez le, le Macron :
«J'ai décidé qu'on allait créer un mouvement politique nouveau qui ne sera pas à droite, qui ne sera pas à gauche », «je veux aussi travailler avec des gens de droite»

Cette formation autorisera la «double appartenance» des éventuels militants LR ou PS qui souhaiteraient le rejoindre.!

 Élever les renards et les poules dans le même enclos ? Non mais, il rêve, le Macron !

Qui a, rappelons le, été élevé chez les renards, puisqu'avant de prétendre vouloir être au-dessus des partis, il officiait… à la banque Rotschild et Cie de Paris. (A ne pas confondre avec la banque Edmond de Rotschild, il paraît que la nuance est d'importance..)




Mais vouloir mélanger impunément la gauche et la droite ne pouvait pas plaire à celui qui s'efforce depuis des années de coller des étiquettes de gauche sur des pots de droite et de travestir le loup en agneau, j'ai nommé Manuel Valls.


« Dans une démocratie, il y a forcément des forces politiques. Il y a même une gauche et même une droite. Il y a des extrêmes gauches et une extrême droite. Et heureusement. C'est ainsi que fonctionne notre démocratie. Il serait absurde de vouloir effacer ces différences » 

Non, mais il ne va pas nous bouffer le casse-croûte impunément, le petit aux dents longues. A la queue comme tout le monde ! Mais comme le filon est à la mode, il ne faut pas le fusiller non plus. Ainsi, Monsieur Valls poursuit discrètement sa diatribe :

« Mais nous savons aussi que ces perceptions ont changé, que les différences se sont estompées et parfois même elles ne sont pas perçues par nos concitoyens", a-t-il poursuivi. "C'est pourquoi nous devons être capables de dépasser les clivages partisans et de nous situer au-dessus des petites querelles. »

Ce n'est pas le clivage qu'il faut abolir, juste les petites querelles. C'est quoi les petites querelles, Monsieur l'encore premier ministre : S'opposer à une loi qui détruit le code du travail et anéantit 150 ans d'acquis sociaux, par exemple ?

Monsieur Macron, votre patron monsieur Valls a traité « d'absurdes » vos belles proclamations ! Vous ne répondez pas ?
A défaut d'être constructive, conservez à notre scène politique cette ambiance de vaudeville qui reste à ce jour son seul intérêt… Engueulez-vous ! Donnez-nous une belle bataille de quolibets…



Autre très grand surréaliste, Jean Marc Ayrault, notre nouveau ministre des affaires étagères, qui déclarait ce matin à France-Info :

 « la France est à la pointe de la lutte contre l'évasion fiscale ».

C'est oublier qu'en décembre dernier, il y a moins de six mois, à la demande du gouvernement, l'assemblée a vidé de son sens une loi destinée à assurer la transparence fiscale des établissements internationaux.

C'était l'occasion. Elle est manquée. Ne sait quand reviendra...

Incompétence ou mensonge éhonté, monsieur Ayrault ? Confondu la droite et la gauche, vous aussi ? 








vendredi 1 avril 2016

531° Je sens que ça vient...






Je ne me faisais pas trop d'illusions en votant Hollande il y a trois ans, trop heureux de pouvoir éviter à ce prix une rechute de sarkozite.

Mais je n'imaginais pas me surprendre, trois ans plus tard, à faire un bras d'honneur de satisfaction à ma télévision en y voyant « mon élu » renoncer enfin à ses scélératesses sur la déchéance de nationalité.




Avec ce genre de mesure, la gauche, ou ceux qui prétendent l'incarner, marchait dans les pas de son maître en nationalisme qui prône « la défense de l' identité française ». Du dévoiement pur et dur de ce qui est, justement, l'identité française, car il faut être aussi nul qu'on l'est ordinairement dans le monde politique pour croire que « l'identité française » est un monolithe inchangé depuis le temps des menhirs.

A peine cette mesure inique rangée au département des scories du fascisme, à peine ce dérapage conjuré, voilà le char de l'état qui amorce une nouvelle embardée droitiste avec cette loi sur le travail.

Certains slogans qu'on peut lire dans les manifs expriment clairement le décalage des législateurs avec leur peuple : 

« ce que la droite n'a pas osé faire, la gauche le fait »…

Abolir l'esclavage n'aura pas servi à grand-chose s'il suffit aux grands ordonnateurs d'en changer le nom, d'en réécrire la définition et d'en modifier l'éclairage pour le présenter comme une nouvelle valeur sociétale.

Pendant l'occupation sarkoziste, je me désolais, au fil des pages de ce blog, de voir le petit imposteur détricoter ligne par ligne le code du travail, le vider de son sens par des mesures qui, regardées séparément, paraissaient anodines, mais dont l'ensemble, parfaitement cohérent derrière le voile d'une agitation politicienne habilement entretenue, constituait un programme méthodique de destruction des acquis sociaux.

L'arbre ayant été élagué, il restait le tronc. C'est à cet abattage définitif que s'est attaqué le trio Hollande-Valls-Gattaz. Cinq générations se sont battues pour nous construire un monde moins hostile, quelques traits de plume de ces traîtres sociaux prétendent maintenant nous ramener au XIX° siècle.




Il est à ce jour quelques prémisses réconfortantes pour le vieux soixante-huitard dont vous lisez la prose: les manifestants sont restés toute la nuit place de la République.

Une page Facebook et différents comptes twitter assurent la pérennité de cet élan.

Et de plus, hier, il pleuvait, alors qu'en 1968, il faisait beau. Cela semble peu, la nuit, la pluie. C'est pourtant beaucoup. C'est le germe. L'insurrection qui vient...




D'ailleurs, le gouvernement a bien senti le danger, qui a envoyé ses gladiateurs évacuer la place de la République ce matin à l'heure du laitier. Mais maintenant, il va devoir l'occuper en permanence… 

Depuis les attentats, la place de la République est devenue le symbole de nos libertés. De quoi aura l'air un pouvoir qui l'occupera les armes à la main pour empêcher d'y fleurir le Temps des Cerises ?

Pour ne pas voir Paris transformé en réseau de barricades, nos édiles devront en faire une zone militaire. Avec l'alibi du terrorisme, peut-être ?

Autant de petits détails qui devraient inciter les Dalton du gouvernement à prendre un salutaire virage à gauche avant qu'on retourne leur carrosse. Je n'ai plus l'âge d'aller jeter mon pavé, mais je leur apporterai volontiers du vin et des sandwiches sur les barricades.