mercredi 21 septembre 2011

395°. La société change doucement... Pas encore en France, mais...


En Italie...


Le problème du « outing » donne lieu à de nombreux débats et il se pose actuellement en Italie. Il était une fois un mouvement LGBT italien qui s'appelait Arcigay, dont les rangs étaient divisés entre ceux qui voulaient bouger et ceux qui croyaient, à l'instar d'Arcadie en France dans les années 70, qu'il suffisait de fréquenter les allées du pouvoir avec de belles cravates pour voir des droits LGBT tomber du ciel comme par enchantement.

Et comme dans toutes les églises, Arcigay y croyait toujours et rien ne tombait jamais. Alors, le président de l’époque Aurelio Mancuso a quitté le commandement de troupes qui ne voulaient pas avancer pour créer un autre mouvement plus dynamique, Equality Italia, dont il est aujourd'hui le président. Mancuso prétend, - à juste titre- que les ronds de jambes et autres révérences ne font plus avancer le gay schmilblick, et que c'est en intervenant sur le terrain politique, -terreau de l’homophobie par son caractère populiste- qu'il pourra désembourber le chariot.


La politique, Aurelio Mancuso, la connaît bien puisqu'il sort de ses rangs : il a longtemps milité et tenu une place importante dans le mouvement de la gauche démocrate italienne. Et à la fin septembre, il entre en guerre et sort un blog, où il explique posément mais fermement que la démocratie ne peut pas se nourrir d'hypocrisie, que la moindre des choses que l'on peut attendre d'un élu gay est de ne pas soutenir des dispositions homophobes, et qu'il s'apprête donc à outer tous ceux qui viennent de le faire s'ils ne changent pas d'avis rapidement.

Parce que, justement, en Italie, cela vient de se produire. Le nombre des agressions homophobes , verbales et physiques monte en flèche, et un projet de loi portant aggravation des peines pour de telles agressions, -à l'instar de ce qui existe dans la plupart des pays civilisés- était arrivée sur le bureau du parlement. Et le parlement l'a rejeté le 26 juillet dernier.

Le débat s'est limité à quelques échanges de slogans : « Les homosexuels sont des Italiens comme les autres, on ne voit pas pourquoi ils seraient bénéficiaires de protections spéciales » a dit Berlusconi. « S'ils sont des Italiens comme les autres, a rétorqué Padanè, président d'Arcigay, on ne voit pas pourquoi ils seraient agressés plus que les autres », et les choses en sont resté là. Ce qui est trop peu.


Le problème est que, dans la majorité des députés qui a refusé le projet figure un bon nombre d'homosexuels, comme ce fut le cas en France en 1962 lorsque le parlement vota les amendements Mirguet à l'unanimité moins la voix d'Henri Caillavet , -hétéro-, alors que suivant Roger Peyrefitte, s'y trouvaient « au moins 11 députés notoirement homosexuels, plus ceux qu'on ne connaissait pas... ». (Des Français, Flammarion 1970).

Voilà donc l'Italie gay divisée en deux, comme le sont d'ailleurs tous les mouvements LGBT européens, entre militants de salon cramponnés au respect de la vie privée même si cela doit leur retomber sur la tête, et militants activistes qui affirment que les homophobes ne se gênent pas pour nous couvrir d'opprobres diffamatoires, d'amalgames mensongers et de contre-vérités populistes, ce qui légitime les gays à riposter en ne proclamant rien de plus que la vérité toute nue.


Ce qui me semble personnellement tout à fait fondé : je veux bien pardonner un peu de lâcheté, mais pas la trahison. Face à une mesure homophobe, un élu homosexuel vote contre « par humanisme » ou s'abstient « par lâcheté », mais il n'apporte pas de voix scélérate à nos exterminateurs.

La politique suppose un minimum de réalisme, et ne saurait se cantonner à quelques grands principes abstraits. Les lois et leur esprit, c'est bien pour une chaire de droit ou de philosophie, mais lorsqu'on les applique à une population où « ont pu se glisser quelques esprits simplets », elle est reçue comme la légitimation des actes et agressions homophobes. « Puisque ce n'est pas illégal, c'est permis ». L'explosion des agressions homophobes en Italie, soutenue par les vociférations des riches partis d’extrême droite et par les hypocrites bénédictions du Vatican donne la mesure de cette dérive.


Alors, la scène militante LGBT italienne se divise en deux : ceux qui tendent l'autre joue à l'image de la star du Vatican, et ceux qui contre-attaquent. Aurelio Mancuso quitte la tête de la complaisante Arcigay pour fonder un mouvement « Equality Italia » , décidé à « rentrer dedans ».



Je suis particulièrement sensible à ce remue-ménage, car toutes les composantes existent en France, où au moins un homme politique gay a soutenu cette année un projet homophobe. Après « mani pulite », vive l'opération « cazzi pulite ».





En Allemagne....


Joli remue ménage en Allemagne aussi, où les démocrates chrétiens font défaut à l'alliance du SPD de Merkel , qui se vautre aux élections notamment dans le land de Berlin où il réalise 1,8%, moins du tiers des 5% nécessaires pour être représenté, moins que les 2,4% du groupuscule néonazi, et alors que le « parti pirate » qui représente la liberté des internautes, réalise 8,9% des suffrages et envoie 15 députés au parlement du Land.

Mais Berlin, même s'il illustre la tendance générale des élections allemandes où Merkel et les libéraux font un fiasco, n'est pas un land comme les autres. Le maire gay, Klaus Wolvereit, y a promulgué un décret instaurant la lutte contre l'homophobie dès l'école primaire, et sort victorieux de ces élections avec la stature de devenir l'adversaire potentiel de Merkel et de ses libéraux aux prochaines élections générales de 2013, de nombreux länder ayant suivi cette tendance. Tendance européenne sans doute due à l'arrivée aux urnes d'une nouvelle génération, la droite allemande reçoit une raclée que l'on espère annonciatrice des prochaines échéances françaises, où notre droite se crispe et se ringardise, tant sur les questions LGBT que sur la gestion des inégalités.

La semaine dernière, une manifestation préventive à la venue du pape à Berlin a été repoussée par l'autorité en place. L'autorité vient de changer : attendons le traitement de la prochaine manif et de la visite à proprement parler de Mr. Ratzinger. C'est demain...



jeudi 15 septembre 2011

394° UMP : Pourquoi tant de haine ?




Dans les articles précédents, je faisais le bilan des attaques répétées de l'UMP contre le statut, les droits et les libertés des homosexuels dans ce pays. Trois mesures au cours de l'été...

Eh bien non, ça continue. Après les 80 députés, 113 sénateurs dont 98 UMP montent à leur tour au créneau contre l'enseignement de la théorie du genre, Lionel Luca croit pouvoir prétendre que cette théorie conduirait à la banalisation de la pédophilie, et Jean-Marc Nesmes saisit la MIVILUDES (service du ministère de l'intérieur spécialisé dans le contrôle des dérives sectaires) en affirmant que cette théorie du genre relèverait, justement, d'une « dérive sectaire ».


Toute cette haine déversée me ramène à mes manuels d'histoire, et en particulier à la sombre période des années 30 où on accusait les Juifs de tous les maux et de toutes les tares.

On trouve quand même de nombreux et inquiétants parallèles. Bismark affirmait que « les Juifs constituaient une race inférieure ». Vanneste, à notre époque où on n'ose plus parler de race, affirme que « l'homosexualité est une pratique inférieure à l'hétérosexualité », déclaration pour laquelle la justice finira d'ailleurs par le blanchir...

Les Nazis déclaraient que « les Juifs constituaient un danger pour la société », les déclarations sur la « dangerosité de l'homosexualité" se multiplient aujourd'hui, et ceci avec une impunité d'autant plus grande que certaines de ces vociférations émanent du pape, , qui semble au-dessus des lois au point que personne ne voit comment on pourra le traduire devant un tribunal...


En 1880, le pasteur Adolf Stöcker, inspirateur de Hitler pour Mein Kampf, déclare que le lobby juif allemand manipulerait la presse et la finance. Aujourd'hui, tous les jours, la dénonciation d'un « lobby gay » est devenu un argument quotidien des homophobes.


Dans les années 30 et 40 en Allemagne, les années 40 en France, on licencie les Juifs, on organise des « manifestations spontanées » contre eux. Aujourd'hui, des gays sont obligés de déménager sous la pression du voisinage, de démissionner de leur entreprise, ils sont souvent chassés de leur famille au point qu'une institution spécialisée reconnue d'utilité publique croule sous les demandes d'asile des mineurs rejetés.


On estime pourtant à 200 000 le nombre de jeunes français élevés des parents homosexuels. Plusieurs associations sont là pour en témoigner. Mais aux chiffres, les imprécateurs préfèrent le persiflage. On continue à contester la légitimité et même la capacité d'un homosexuel à élever un enfant, alors que personne ne se soucie du devenir de ceux qui sont déchirés dans des familles hétérosexuelles qui ne fonctionnent pas.


Les nazis avaient créé des « zones aryennes » interdites aux Juifs. A Londres, un comité de quartier a tenté de créer une « zone hétérosexuelle interdite aux gays ».... . Et sans aller à Londres, la quiétude des gays dans les belles banlieues de notre douce France est un problème qui ne sera sans doute pas résolu demain...


Quand retrouvons-nous nos valeurs républicaines d'égalité, de fraternité et de liberté ?

Le débat de ce soir entre les candidats socialistes , -que je ne regarderai pas en direct, la presse nous en rebattra les oreilles toute la semaine- peut apporter certaines réponses dans les intentions.

Quelle énergie mettra l'élu de gauche pour faire entrer les bonnes intentions qu'il ne manquera pas de manifester devant les caméras ? Comment s'y prendra-t-il pour redresser les mentalités, remettre l'humanisme au centre de d'opinion publique, gommer les ostracismes, effacer les haines, rétablir le respect et la tolérance ?