samedi 6 janvier 2007

77° L’Eglise polonaise à nouveau distinguée.

Les habitués de ce blog auront remarqué qu’il y a un certain temps, -presque longtemps- que nous n’avons pas parlé de la Pologne, cette délicieuse contrée célèbre pour sa vodka, ses commandos ultranationalistes, ses escouades intégristes et ses nervis homophobes qui attaquent pêle-mêle les gay pride, les lieux supposés gays et même les honnêtes citoyens suspectés de partager certaines passions pour les Antinoüs locaux. (Voir les articles 54 et 63 notamment..)

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Ministres et président y déblatèrent régulièrement contre l’homosexualité en s’appuyant sur la toute puissante église catholique. Je crois parfois déceler dans leurs propos quelque chose comme de la nostalgie à l’égard des méthodes jadis employées dans cette riante contrée pour gérer ceux qu’on affublait alors d’un triangle rose.

Le genre de discours qui a valu à Vanneste une condamnation en France fait là-bas figure de langage officiel modéré. Dois-je rappeler que les célèbres duettistes et frères jumeaux Lech Kaczynski, président, et Jaroslaw Kaczynski, premier ministre, ont déclaré sans rire, -et aussi sans faire rire personne, hélas - que l’entrée de leur pays dans l’Europe le 1° mai 2004 -jour de la fête mariale -, illustrait une ferme volonté de leur part de restaurer les valeurs chrétiennes en Europe……

Pour mention, l’une radios les plus écoutées en Pologne aujourd’hui est radio Maryja, une radio religieuse qui appartient aux congrégations rédemptoristes de Varsovie, comme la chaîne de télévision Trwam, et cofinancée par l’état polonais. Dire que radio Marija est anti libertaire et homophobe est un doux euphémisme : elle est carrément antisémite, affirmant que le camp d’Auschwitz n’était qu’un camp de travail comme un autre. Elle est tellement à la droite de la droite du père que quelques évêques polonais (il y en a beaucoup là-bas) ont dénoncé l’exclusivité que le parti conservateur au pouvoir lui a accordée lors de la dernière campagne électorale. Même le Vatican lui a retiré son soutien officiel ! C’est dire ! Je pense qu’une telle radio ne pourrait proférer impunément tant d’énormités dans aucun autre pays d’Europe…

C’est dans cet éden des libertés individuelles que pète aujourd’hui un nouveau scandale dont l’église catholique est à nouveau une pièce maîtresse, puisque là-bas, on ne peut rien faire sans elle, même pas les scandales.

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Le nouvel archevêque de Varsovie, Stanislaw Wielgus, vient de reconnaître qu’il a juste un peu collaboré avec la police secrète communiste qui sévissait là-bas lors d’une précédente époque barbare.

Souvenons-nous. En 1970, à Gdansk, le syndicat Solidarnosc, qui réunit les ouvriers des chantiers navals, s’oppose, d’abord timidement, puis de plus en plus fermement à la dictature communiste. Il a besoin d’un ciment : ce sera l’église catholique, si solidement implantée là-bas que les communistes ont renoncé à en venir à bout comme ils l’ont fait en Tchécoslovaquie. Ce peuple catholique sans prélat montre le bout de son nez et de ses cierges, et sous la conduite d’un certain Lech Walesa, qui après une carrière tumultueuse, non dénuée de courage et agrémentée de quelques emprisonnements, fait reconnaître son syndicat au plan international en 1980, jusqu’à se faire élire président de la république en 1990, aux premières élections démocratiques qui suivirent la chute du mur.

A l’époque, l’église catholique s’est présentée comme la main ouvrière, le ferment de la révolution anti-communiste. L’occasion était trop belle : comment n’aurait-elle pas pris en marche un train qui s’ébranlait toutes portes ouvertes ?

Y avez-vous vraiment cru ? Moi, non. Il y avait un mouvement d’opinion, une campagne d’information, - de désinformation- soutenue par toutes les forces conservatrices, anti-communistes primaires, catho et nationalistes possibles. Mais fallait-il prendre cette intox pour argent comptant ?

Pourquoi les choses ne se seraient-elles pas passées en Pologne comme dans toutes les dictatures ? Comme au Portugal, en Espagne, au Chili, en Argentine ? Dans tous ces pays, l’église a toujours été du côté du manche, et le goupillon a toujours défilé à droite du glaive.

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C’est du peuple qu’est survenu le sursaut libertaire, comme partout. Or le peuple polonais est catholique grand teint, puisque là-bas, tout est catholique jusqu’aux canaris et aux poissons rouges.

L’occasion était trop belle pour l’église de ne pas monter sur le char du triomphe lorsque fut enfin terrassé son ennemi du siècle, le communisme. Mais pouvait-elle pour autant revendiquer l’artisanat, la gestion, de cette victoire ? Certainement pas ! Il aura fallu longtemps pour en obtenir des preuves, mais tout arrive.

Alors l’église suspendra-t-elle le presque archevêque ou le laissera-t-elle goûter aux délices de la toque ? Quoi qu’elle fasse, ce sera injuste. Si elle le suspend, il faudrait qu’elle suspende aussi une bonne partie du clergé de Pologne, mais aussi d’Argentine, du Chili, et d’ailleurs…

Tant de monde suspendu, la curie romaine va ressembler à un repère de chauves souris !

Car pas plus tard que le mois dernier, remarquons que l’église a, la même semaine, accordé sans tousser des funérailles religieuses à Pinochet alors qu’elle les refusait à un malheureux italien, Welby, dont la seule faute était d’être réduit à l’état de légume depuis cinquante ans, et d’exiger qu’on le débranche des appareils de torture médicaux qui le maintenaient en vie de force depuis des décennies… Souvenons nous que l’église a aussi enterré Franco et Salazar, et que le général Videla se battait pour protéger « la civilisation occidentale chrétienne » . Il n’est pas encore mort, celui-là, mais en « résidence surveillée ». L’église l’enterrera-t-elle ?

Puisse cette nouvelle affaire polonaise mettre fin à une quasi imposture, rendre à chacun la place qui lui est due, remettre l’église à la droite du pouvoir fort où l’histoire la retrouve toujours et partout, et éclairer d’une lumière définitive les objectifs politiques du dogme et de la doctrine de la foi.

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