Le 20 décembre dernier, le petit Nicolas déclarait dans son discours du Vatican:
« l’instituteur ne pourra jamais remplacer le pasteur ou le curé, »,
et deux mois plus tard, le 13 février, dans son discours du CRIJF:
« Et jamais je n'ai dit que l'instituteur était inférieur au curé, au rabbin ou à l'imam pour transmettre des valeurs. »
et encore deux jours plus tard, le 15 février, à Périgueux:
« Je propose que l’on entreprenne la réforme de l’Etat par l’évaluation des politiques publiques, en supprimant celles qui ne sont pas efficaces ou qui sont contradictoires. ».
Il y en a plein, comme ça. Quel style! Il y avait les bushismes, nous avons les sarkozismes.
Mais l'art est différent: alors que le bushisme est une connerie finie et autonome, le sarkozisme consiste à rapprocher des déclarations contradictoires qui résultent d'un clientélisme forcené et grossier, mais « plus c'est gros, mieux ça passe » comme disait son prédécesseur.
On part à la chasse au sarkozisme comme à la cueillette au champignons, armé de patience et d'abnégation.
Pour le champignon, il faut longuement marcher dans les ronces et la boue jusqu'à trouver l'objet du délice. Pour le sarkozisme, il faut lire tous les discours qu'il prononce, ce qui n'est guère plus enviable que d'arpenter les ronciers, jusqu'à dégoter la paire qui fait tilt quand on les rapproche.
Mais quand on voit les résultats, on comprend mieux la formidable aptitude de l'artiste à se mettre à dos des catégories sociales que rien n'aurait, à priori, disposé à la révolte.
Parce que donner raison aux uns (par exemple les pasteurs et immams contre les instituteurs), puis se renier et renverser la vapeur ne va pas le réconcilier pour autant avec les instituteurs, et indisposera définitivement le clergé qui aura pu juger à l'occasion de la solidité de son soutien. Maintenant, tout le monde est fâché.
Même s'ils ont obtenu le retrait de la proposition Attali qui les concernait, et même une augmentation de leurs tarifs de 3,1%, les taxis n'ont pas oublié la légèreté avec laquelle on les aurait sacrifié pour faire mousser quelques chiffres. Le vote du gros des troupes est perdu... sans préjudice des dégâts collatéraux: entre les Français qui trouvent en général leurs taxis arrogants et auraient aimé qu'on les mette au pas, et ceux qui n'apprécient pas que l'état recule devant une bronca corporatiste, il y a aussi beaucoup d'électeurs perdus.
Entre les personnes âgées qui n'ont pas apprécié la vie de patachon du président, et celles qui se sont scandalisé lorsqu'il a essayé de racheter leur vote par l'octroi d'une avance sur certaines retraites, il y a encore pas mal d'électeurs perdus.
Et lorsqu'ils constateront que les retraites visées sont minoritaires, que la plupart d'entre elles ne sont pas concernées par la mesure et que l'effet d'annonce est bien plus grand que l'effet social, il y en aura encore bien davantage. Mon billet précédent traitait de la productivité des hommes politiques, nous y sommes toujours.
Sarko n'a pas encore compris qu'en politique, on perd bien davantage en reculant qu'en avançant, et qu'à cet égard, son empressement, sa permanente fébrilité et son état d'agitation sont autant de handicaps rédhibitoires, et qu'il gagnerait plus à réfléchir davantage qu'à foncer dans le brouillard. Le problème est que, comme il avance dans de mauvaises directions et sans discernement, quoi qu'il fasse, il perd. Les sondages sont là pour le prouver.
Le monde ouvrier apprécie d'autant mois le caractère « implacable » des décentralisations qu'il constate que le recours aux subsides de l'état, présenté comme impensable même par Jospin, devient soudain envisageable lorsque les sondages sont en déroute. (Mital à Gandrange, et quinze jours plus tard Kléber-Michelin à Toul).
Résultat, le peuple des travailleurs est écœuré par la versatilité d'un personnage dont la détermination à leur nuire s'avère non pas une raison d'état comme il le prétend, mais le levier de commande de sa popularité, et le cénacle de la haute finance doit s'interroger sur la fiabilité d'un général qu'il a envoyé au front à grand renfort de moyens de toutes sortes pour éradiquer le code du travail, et qui recule à la première fusillade. Car si, rendu où il en est, le souci de Sarko est maintenant de durer, celui du grand patronat est d'avancer, et pas de le faire durer: ils ont d'autres généraux si nécessaire.
Tout cela fait très lutte des classes, j'en conviens, mais je me demande si aujourd'hui, le principe actif de la lutte des classes, devenu un peu désuet dans le monde ouvrier de nos pays européens, n'est pas ravivé « à l'envers » avec force et vigueur par « le parti des possédants ».
On se demande parfois si « le moteur néo-libéral » n'a pas juré la perte des classes moyennes, qui le gène par son accès à la culture et son aptitude à réfléchir et à philosopher, pour revenir à la situation antérieure d'un face à face élite-sous-prolétariat, seigneur - cerf, sachant – ignorant, dans lequel même l'intermédiaire « vassal » serait jugé onéreux et encombrant. Il y a des ordinateurs pour ces tâches subalternes, maintenant. L'appel au retour de l'autorité religieuse dans ses fonctions traditionnelles d'asservissement des masses évoqué par les multiples discours de Latran et de Ryad entre parfaitement dans la reconstitution de cet arsenal de guerre.
Et puis, dans le cadre de « une nouvelle idée tous les matins pour refaire une vitrine neuve », il y a quelques ratés. Les créatifs les plus avisés ne peuvent pas pondre une perle rare tous les jours, et l'un des derniers avatars de cette technique est l'idée de « confier la mémoire d'un enfant déporté » à un enfant de CM2. (âge moyen = 10 ans.).
Je ne suis pas sûr que le détail de l'horreur de la déportation soit particulièrement adapté à la construction de l'équilibre d'un enfant de 10 ans. Et aller chercher l'excuse que le cinéma et la télévision leur distillent également des violences, c'est égarer le troupeau: si on veut faire quelque chose pour nos têtes blondes, épargnons leur plutôt cette brutalité des scénarios et ce culte des héros violents dans les médias au lieu d'y rajouter celle des camps de la mort. Mais, pouvoir religieux oblige, c'est sur le sexe pourtant si naturel bien plus que sur la violence, dont les religions sont de grandes usagères, que se concentre la protection de nos têtes blondes.
Mesure injuste, aussi: car sans rien retirer à l'horreur de la déportation des enfants juifs, il ne faut tout de même pas oublier, qu'aujourd'hui, par la grâce du néo libéralisme et de ses inégalités et par le miracle de la vertu des religions et de leur intolérance, des enfants meurent encore chaque jour pendant que vous lisez ces lignes, des enfants qui ont aussi des noms, mais qui ne sont l'objet d'aucun enjeu électoral.
Il y a aussi les « ratés collatéraux » comme la déclaration de Valérie Pécresse, qui volant au secours de son patron, déclare que « le journal d'Anne Frank » a accompagné ses années de collège. Les miennes aussi, mais au collège, on a 15 ans, pas 10, chose que Madame Pécresse, qui est tout de même ministre de l'enseignement supérieur, ne devrait pas ignorer.
D'ailleurs, puisque notre président a sous la main plusieurs ministres voués à l'enseignement, il devrait en profiter pour rafraîchir ses notions d'histoire. ( Je suis poli, je n'ai pas dit « acquérir »)
Quand il déclare:
« 29 jan 2008 ... « Des dizaines de millions de gens sont morts au cours du dernier siècle à cause des idéologies sans dieu que sont le communisme et le nazisme. »
Loin de moi l'idée de défendre de tels systèmes, mais tout de même... Faisons deux colonnes, l'une « guerres de religion » et l'autre « guerres laïques ». Remplissons les de deux mille ans d'histoire, et voyons quelle colonne sera la plus longue.
Sans parler des victimes du néo libéralisme, -l'idéologie sans dieu à la mode-, dont la liste s'allonge chaque jour, et qu'on ne compte même plus...
Ce n'est pas parce qu'on a pas encore réalisé une spiritualité laïque qu'il faut considérer qu'elle ne peut pas exister. Il suffirait de s'en donner la peine.
On collectionne maintenant les discours de Sarko en fonction du nombre de perles qu'on y trouve.
Donc, après les discours du Latran et de Ryad, dans le discours de Périgueux, on trouve:
« le socialisme est déjà une idée morte ». On va voir ça aux municipales, hein?
« [ je ne veux pas d'une société] qui transforme le citoyen en assisté, », et quatre lignes plus bas:
« [la France] est prête à donner plus à ceux qui ont moins. »
Puis:
« Je le dis comme je le pense : aujourd’hui en France les prix sont trop hauts et les salaires sont trop bas. »
C'est sans doute pour cela qu'il vient de donner un coup de pouce de moins 5% aux retraites, et zéro % au SMIC?
Mais rassurons nous, l'imbécillité politique n'est pas une exclusivité française:
Le royaume de Bahrein, proche de l'Arabie Saoudite, est une monarchie constitutionnelle dotée de deux chambres qui s'occupent actuellement à étudier un projet de loi visant à accroître la répression de l'homosexualité, au prétexte qu'elle serait contraire au coran.
Soucieuse de se donner des moyens à la mesure de ses objectifs, elle prévoit d'inspecter avec soin les salons de coiffure, hammams et bains publics où l'homosexualité serait omniprésente. Si vous avez des cassettes de la Cage aux Folles, il est temps de les enterrer dans le jardin!
On ne sait pas s'il y aura des tests, comme en Egypte, qui les fera subir et quels seront les moyens d'investigation et d'appréciation...
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire