mercredi 9 janvier 2008

142° Quand les faits divers font la loi.


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Est-il utile de rappeler quelques éblouissantes fusées-promesses que notre président-artificier, pour se faire élire, avait tirées dans le ciel obscur d’une campagne sans éclat ?

Une augmentation de 25% des retraites dont il nous a pour le moment donné 1,1%, assorti d’une augmentation de 3% de CSG, ce qui porte à - 2% sa contribution à leur pouvoir d’achat. Ça fait des moyennes avec le sien.

Egalement l’abolition de la double peine. D’abord, les revues spécialisées nous indiquent que la double peine a été bien davantage occultée que supprimée, et qu’il ne faut pas gratter beaucoup les textes administratifs pour l’appliquer aujourd’hui aussi facilement que naguère.

http://lmsi.net/spip.php?article501

Et ensuite et surtout, il fait bien pire. Saisissant au vol l’hystérie ambiante sur les délinquants sexuels (comme s’ils n’avaient jamais existé…), il vient de fausser tout le système judiciaire issu de la déclaration universelle des droits de l’homme et de la révolution. Car la petite « exception » qu’il veut faire voter à propos des assassins et autres violeurs, en dépit de tous les discours lénifiants et populistes qu’on pourra faire pour la défendre, est un entrebâillement d’une boîte de Pandore qu’on a eu tant de mal à refermer à plusieurs époques de l’histoire. Dans les années 40 en particulier.

En effet, notre droit est basé sur le jugement et la punition des actes que nous avons commis, sur la base de faits constitués et prouvés. C’est ce qu’on appelle la présomption d’innocence.

Avec le maintien en détention des « supposés dangereux » au-delà de la durée de leur peine, nous entrons dans le domaine du procès d’intention. Ce n’est plus sur ce que les gens ont fait qu’on va les punir, mais sur ce qu’ils pourraient faire. Sur ce qu’on les croit capables de faire.

Or il va sans dire que les gens qu’on n’aime pas, on les croit capables de tout, et surtout du pire. C’est au nom de ce principe préventif qu’on a jadis, massacré des « infidèles », interné des opposants, déporté des juifs, des tziganes et des homosexuels. C’est pour le plus grand bien de leur âme qu’on a torturé, haché menu, grillé sur le bûcher des cohortes de malheureux que l’on estimait inaptes à vivre plus longtemps dans le troupeau..



Si quelqu’un est assez dangereux pour qu’on puisse décider de le garder enfermé, ça devrait se voir tout de suite. L’instruction qui suit son arrestation devrait l’établir, le mettre en évidence, le prouver. Ce n’est pas après vingt ans de prison pendant lesquels on n’a rien fait pour l’aider qu’on va découvrir sa dangerosité et décider de le garder au frais. Sinon à quoi bon l’avoir jugé et arrêté ?

C’est là affaire de manque de courage et de moyens.

Manque du courage de s’attaquer au fond des problèmes, préférence à se cantonner à des mesures plus génératrices d’effet d’annonce que d’efficacité réelle.

Manque de courage d’appliquer vraiment des peines de prison fermes et louvoiement hypocrite dans un système de durées élastiques où la tête du client et la bonne humeur du juge d’application des peines ont prééminence sur la décision de jurés qui, en leur âme et conscience, ont décidé d’une peine correspondante au délit. A tel point que les condamnations d’aujourd’hui prennent en compte le jeu des remises de peine, ce qui aboutit à un système complètement aberrant.

Manque de courage d’oser dire à quelqu’un qu’il n’est pas « sociable » et qu’on va le soigner, comme si ne pas avoir été « normal » à un moment signifiait qu’on allait irrémédiablement continuer à ne pas l’être. Il est vrai que c’est difficile quand on se souvient en quels lieux et en quelles circonstances cela a déjà été dit. Mais c’est le prix du courage.

Par contre, le prix de la liberté, c’est de savoir que tant qu’on n’aura pas cloué tous les avions au sol au prétexte qu’il y en a parfois un qui s’écrase, on ne pourra pas enfermer sans mesure des gens qui ont payé leur faute au prétexte que l’un d’eux pourrait récidiver.

Car n’oublions pas qu’avec cette équipe gouvernementale, nous avons affaire à une bande d’habiles chirurgiens du droit, capables de démonter le droit du travail ligne par ligne et catégorie par catégorie jusqu’à l’état d’avant le front populaire…

Qu’est ce qui nous prouve qu’ils ne vont pas appliquer la même méthode insidieuse et sournoise à tous les autres droits, y compris aux libertés individuelles ? Ce travail de patiente déconstruction n’est-il pas déjà commencé ?

Soutenu par des médias myopes, voire aveuglés, qui élèvent la parano au rang de vertu cardinale, ne vont –t-ils pas, à force d’associations nauséabondes et d’assimilations diffamantes, finir par faire passer tous les petits délinquants pour des asociaux irrécupérables, tous les immigrés pour des parasites, tous les musulmans pour des terroristes, tous les gays pour des pédophiles en puissance, et tous les gens de gauche pour des agitateurs extrémistes ?

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