mercredi 4 avril 2007

88° Les élections de l’angoisse



Plus de trois semaines sans article…. Non, je vais bien, merci de réclamer. La raison de ce silence, c’est surtout une vie pleine de petits bonheurs à deux, avec tous les engagements que ça comporte, qui me tient éloigné de mon clavier. Sachez aussi qu’un article sur ce blog, rédaction, recherche d’illustrations, mise en page et mise en ligne, c’est quasiment une après-midi d’ordinateur. Or je suis un retraité très très actif, qui a plein de choses à faire.

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Aussi de quoi parler ? Des élections, bien sûr, mais la situation actuelle présente la double caractéristique d’évoluer chaque jour sans jamais révéler de tendance stable. Jamais l’horizon politique n’a été si bouché.

Commençons par la Pologne. Il y avait longtemps, hein ? Le drame, c’est que la Pologne, ce n’est pas l’Irak après la pacification bushienne, c’est en Europe.

Et là-bas, ça devient très grave. Le vice-premier ministre et ministre de l'éducation Roman Giertych a présenté un projet de loi. Dans ce projet, il est question d’interdire l’enseignement aux homosexuels !!! Ça ne vous rappelle rien, les interdictions professionnelles ?. Vous imaginez une école fermée avec un triangle rose sur la porte? C’est ce qui pend au nez des Polonais.

Roman Giertych est le président de la Ligue des familles polonaises (LPR), un parti catholique ultra-conservateur et antisémite, à l'extrême droite de l'échiquier politique.

Il faut savoir que bloquer l’information sexuelle objective dans l’enseignement, c’est fabriquer une ou deux générations d’homophobes. C’est susciter des centaines de milliers de vies gâchées, hommes et femmes après des mariages forcés, provoquer des milliers de suicides, et condamner son pays à un retard appréciable sur l’échiquier international. Mais rien n’y fait : ni les injonctions de l’ONU, ni les vitupérations du Conseil de l’Europe. La seule chose qui intéresse les Polonais dans l’Europe, ce sont les subventions. Pas les droits de l’homme. Pas les libertés individuelles. Pas la liberté de conscience. Les monothéistes ne règnent qu’en focalisant la haine de leurs ouailles sur d’étroites communautés de boucs émissaires. Les Juifs ont déjà donné, même si en Pologne, l’antisémitisme a encore des adeptes, mais maintenant, c’est notre tour. Les gays vont payer.

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Evidemment, ce ne sera jamais le tour des cons, ils sont trop nombreux !

Bon, revenons à nos élections.

Au bon vieux temps, mon objectif était dans l’ordre :

1° la barre à gauche toute ! et

2° éviter à tout prix l’extrême droite.

Ces consignes se sont appliquées en 2002 sans trop de difficultés, même si Chirac a dirigé le pays en fonction des 80% qu’il a recueillis au 2° tour dans les circonstances que l’on connaît, en non pas à l’encan des 19% qu’il représentait réellement, tels que mesurés au premier tour.

Certes, le néo-libéralisme a continué à faire des ravages, les lois de modernisation sociale de Jospin ont été subrepticement démontées alinéa par alinéa par les soins de Fillon, mais la marque sanglante de ce quinquennat a été la droitisation d’une droite jusqu’ici plus ou moins humaniste, disons.. –républicaine- sous l’influence de Sarkozy.

L’échiquier a changé. Fini le clivage gauche-droite avec quelques extrémistes de part et d’autre.

Pour moi, la nouvelle donne apparaît en trois parties : une extrème doite inacceptable qui englobe le petit marquis, le Pen et Sarkozy, une droite honteuse mais républicaine autour de Bayrou, et une gauche dont les divisions font peine à voir.

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Le clivage à départager au premier tour n’est plus un peu-ou-prou 50/50, mais un 70/30, voire un 75/25.

Le « tout sauf Le Pen » de 2002 devient un « tout sauf Le Pen et Sarko » qui réduit la gauche à une portion congrue.

Alors tous les nouveaux modes de calcul sont à l’étude. Le plus évident, c’est le vote Bayrou, capable de battre Sarko au second tour, mais qui écarte la gauche du pouvoir pour la deuxième fois consécutive. Ça commence à faire beaucoup, au point que d’aucuns se demandent si on n’a pas plus à gagner à provoquer ce chaos. Car si Sarko passe, chaos il y aura. D'ailleurs, j'ai ressorti mes pavés de mai 68. Ci-joint la photo du pavé parisien modèle "Gay Lussac 68" sur ma table de travail.

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Dans l’état actuel des sondages, l’accès de Ségolène au deuxième tour signifie de manière inéluctable l’élection finale de Sarkozy. Certes, la fourchette se resserre de jour en jour, mais les trajectoires se croiseront-elles à temps pour le deuxième tour ???.

Les nouveaux électeurs des banlieues représentent huit fois le nombre de voix qu’il a manqué à Jospin en 2002. Mais si tous ces jeunes savent très bien pour qui ils ne voteront pas, ils ne savent pas très bien pour qui ils ont voter, n’ont pas l’expérience des bienfaits du vote utile et risquent bien de s’éparpiller en quête d’une utopie qui fera plus de dégâts à gauche qu’à droite.

Si la gauche franchit la barre, ce sera en la frôlant. Jusqu’au dernier moment, il faut pousser, pousser, pousser Ségolène, faire feu de tous bois, avec l’aide des gaffes de Sarkozy que, dieu merci, il continue à multiplier.

Hier au 20 heures d’Antenne 2, on voyait Ségolène houspiller Sarkozy comme il le mérite dans un débat qui avait opposé les seconds couteaux en 2002. Où est passée cette dynamique qu’elle montrait alors ? D’où vient ce ton de maîtresse d’école dont elle a fait son ordinaire aujourd’hui alors que les archives prouvent qu’elle peut faire autrement ?

Quant aux éléphants, ils auront réussi à se faire haïr, tant a été claire leur démonstration qu’ils vivront mieux élus locaux d’opposition que staff-members d’un parti au pouvoir. Cette bande d’Iznogouds se comporte comme un boulet attaché aux chevilles du PS. Il y a du pain sur la planche.

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Le site d’IPSOS (voir Google) donne au jour le jour des tendances qui semblent exprimer que la gauche est toujours en tête en dehors des périodes d’élections… Toutefois, pas à pas, Ségolène se hisse à nouveau au-dessus de Bayrou et grignote son retard sur Sarko au deuxième tour. Arrivera-t-elle à temps ?

Ce sera la première fois de ma vie où, le matin même de l’élection, je n’aurai pas décidé quel bulletin je mettrai dans l’urne, tant ma hantise de voir passer Sarko rivalise avec mon souhait de faire triompher la gauche.

Car pensons-y… Sarko est élu… Un peu de politique fiction. La fracture sociale, devenue frontière de la haine, se hérissera instantanément d’armes redoutables. Quelle banlieue pètera en premier ? Combien la suivront ? Comment contrôlera-t-on les tickets dans les trains ? Commet mangeront les exclus qui vont se multiplier, les radiés de toutes sortes, les « assistés » livrés à eux-mêmes ?

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Deux Frances s’opposeront à tous les instants et en tous lieux. D’un côté un incendiaire, de l’autre, ce que l’incendiaire lui-même appelle des exaspérés, sans se rendre compte que c’est lui et sa politique qui les a exaspérés à ce point.

Une telle élection leur fera perdre le sens commun. Ce n’est plus alinéa par alinéa qu’ils détruiront le code du travail, mais au bull-dozer. Des pans entiers de ce qu’il reste de nos avantages sociaux seront engloutis dans des réformes ubuesques.

Quand je pense que ce sont ces gens là qui disent que le communisme a tué quatre vingt millions de personnes. C’est sans doute vrai, mais il a mis soixante dix ans pour le faire.

Le néo-libéralisme en a déjà tué bien davantage en bien moins longtemps. Et ça continue ! . La seule différence, c’est que c’est plus difficile à compter. Qui compte les Africains victimes des guerres du pétrole et des minéraux que s’y livrent par enfants-soldats interposés les grandes puissances embusquées dans leurs services secrets ? Qui compte les victimes des révoltions fomentées par la CIA en Amérique latine ? Qui compte les victimes des pays livrés aux fanatiques dans un Moyen-Orient déstabilisé par les croisades ?

Des nuages noirs apparaissent à l’horizon. Je ne sais pas comment on va s’y prendre, mais il faut à tout prix éviter Sarko, ses amis américains, sa façon d’organiser le pays en castes, de diviser les gens au lieu de les rassembler, sa logique bâtie sur des sophismes, son arrogance de valet plénipotentiaire, et tout ce qu’il représente.

La boîte aux idées est ouverte, mais vite : le 22 avril, c’est bientôt !

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