Dès le début de
son mandat, le pape s'était lancé dans l'intox. « Qui suis-je
pour juger? » [les homosexuels] avait-il dit aux journalistes.
C'était oublier un
peu vite que quelques mois plus tôt, avant d'être projeté sous les
feux de la scène vaticane, Bergoglio s'était rendu célèbre dans son pays, l'Argentine,
pour avoir été le leader de la coalition anti-mariage gay. Lequel avait quand même été voté en mai 2010. Nous, on avait Frigide Barjot, eux, ils avaient l’archevêque Bergoglio. On fait avec ce qu'on a.
L'alors archevèque de Buenos Aires s'était dépensé sans compter pour faire échouer
le vote de la loi, désignant ses
partisans comme « Le mouvement du diable » (La movida del
demonio) et qualifiant leurs intentions "d'attaque destructrice
délibérée contre les intentions de Dieu".
Il avait organisé des prières dans toutes les églises du pays et avait fait le tour
des radios et télévisions pour avertir les pauvres
argentins de l'apocalypse qui les attendait. Il en profitait – du
temps qu'il tenait le micro- pour vilipender pèle-même le mariage
des prêtres, la légalisation de l’avortement, le contrôle des
naissances, l’ordination de femmes, et le droit octroyé aux
transsexuels de se faire reconnaître par l'état civil.
Ne nous attendons
pas qu'il sorte grand'chose de positif pour les LGBT du synode sur la
famille qui se tient actuellement à Rome. Outre que l'opinion
majoritaire de l'assemblée est clairement homophobe, il est patent
que les déclarations tiédasses du pape sur le sujet ne tendent qu'à
vouloir faire croire aux médias admiratifs qu'il « aura
essayé » de faire quelque chose. Plus on observe sa carrière
« politico-ecclésiastique », plus on comprend qu'il ne
souhaite en réalité aucune avancée dans ce domaine.
La preuve nous en
est fournie par le soutien sans faille accordé par le pouvoir
vatican à l’évêque de Coire, un petit suisse qui avançait pour
doctrine à l'égard des homosexuels le passage du Lévitique (20/13)
qui a provoqué tant de massacres au cours de l'histoire :
«Si
un homme couche avec un homme comme on couche avec une femme, ils
commettent tous deux une abomination. Ils seront punis de mort, leur
sang retombera sur eux».
Une association
suisse a porté plainte contre lui pour « incitation au
meurtre ». Le ministère public du Canton des Grisons vient de déclarer la plainte sans suite, affirmant que l'incitation publique
au crime ou à la violence (article 259 du Code pénal suisse),
n'était pas clairement établie dans cette déclaration publique.
(L’évêque avait prononcé ces paroles lors d'un discours devant
un parterre catho intégriste à Fulda en octobre 2014.)
Que faut-il à la
justice suisse pour entendre cette déclaration comme une
incitation au crime ou à la violence ? Justifier l'exécution
des homosexuels, ce n'est pas du pousse-au-crime ? Il n'y a
pas un peu le feu au lac, là ? L'association plaignante Pink
Cross a fait appel de cet abandon inique.
Pourtant, tout porte
à croire que l’évêque a eu très peur d'être condamné :
depuis des mois, il se confondait en excuses maladroites, en « j'ai
été mal compris » et autres « c'est pas moi msieur le
juge ». A croire que de puissants soutiens ont pu lui éviter
une condamnation que lui même semblait estimer inévitable…
On reproche aux
jihadistes de prendre à la lettre des textes d'un autre âge, force
est de constater que ce Monseigneur Vitus Huonder fait exactement la
même chose. Le problème est que si on poursuit impitoyablement les
premiers, on continue à baiser la bague du second avec la même
obséquiosité.
Pire, son patron, le
Vatican, se garde bien de le désavouer, et encore plus de le
sanctionner. Tout au plus, la conférence des évêques suisses
s'est-elle fendue d'une déclaration à la Ponce Pilate : « Les
déclarations de l’évêque de Coire n’engagent que lui et ne
reflètent pas les positions de l'église suisse ». Positions
sur le sujet qui n'ont d'ailleurs jamais été exprimées et qu'on s'est bien
gardé de préciser malgré l'occasion qui s'offrait.
Ajoutons à ce
portrait édifiant d'homophobie en action le refus du Vatican
d'accréditer le nouvel ambassadeur de France au regard de son
homosexualité. Avec un petit coup de chapeau à la résistance
passive de l'Elysée qui, devant cette discrimination officielle, a
décidé de ne pas nomme d'autre ambassadeur à la place du recalé et de laisser la chaise du représentant français vide en signe de
protestation.
Allez en paix.
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