lundi 10 septembre 2007

119° Sophismes, bushismes et sarkozismes

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Le bushisme, déclaration intempestive sans queue ni tête est devenu, à l’insu de son créateur, un art subtil qui possède ses pièces maîtresses, ses experts et ses collectionneurs.

Ainsi la perle que je cite dans l’article précédent :

« Le problème des Français est d’ignorer le mot « entrepreneur » »

Ou encore :

« Beaucoup trop de nos importations viennent de l’étranger ».

L’art a ses critères et ses règles, et pour être validé, un bushisme doit être entériné par les pontifes de la doctrine, un peu comme un miracle de Lourdes. Il y a donc une page Wikipédia qui définit les règles officielles de ce sport d’élite pourtant réservé à un seul athlète :

http://en.wikipedia.org/wiki/Bushism

et quelques sites de collectionneurs reconnus dont le plus célèbre est :

http://slate.com/id/76886/

En France, nous ne faisons jamais rien comme tout le monde, et nous avons le sarkozisme.



Le sarkozisme diffère fondamentalement du bushisme en ce sens qu’il n’est que rarement produit par l’artiste dont il porte le nom, qui n’est que l’initiateur du mouvement. Ce grand nombre de créateurs contribue à la richesse de l’école.

Curieusement, alors que le chef de file est réputé tout faire lui-même, il délègue volontiers sa puissance créatrice pour élaborer les sarkozismes les plus surprenants.

En quelque sorte, alors que le bushisme ne résulterait que de l’égarement d’une méninge dans la boîte crânienne de l’intéressé, où leur petite taille leur garantirait un espace vital pléthorique, le sarkozisme serait une sorte de bug dans la construction du système du même nom. Un logiciel qui se tirerait dans les pattes parce qu’on l’a programmé pour répondre à tout à n’importe quel prix.

Exemples :

« Nous allons diminuer le nombre des fonctionnaires pour augmenter celui des enseignants ».

« Nous allons exempter les riches d’impôts pour remédier au déficit budgétaire »

« Nous allons radier les chômeurs à tout va afin d’en diminuer le nombre »

« Nous allons fusionner GDF et Suez pour verrouiller notre promesse de ne jamais privatiser GDF ».

« Nous allons voter de nouvelles lois sur les récidivistes et les pédophiles pour nous épargner la peine d’appliquer celles qui existent déjà ».

La dernière :

Contexte : Hier, Fillion, dans une de ses rares lucarnes existentielles, annonce sur Canal Plus que la loi sur les régimes spéciaux de retraite est prête à être appliquée et n’attend que le feu vert du patron. Ce à quoi les responsables syndicaux répondent que ce serait une déclaration de guerre susceptible de provoquer des troubles sociaux majeurs.

On a donc été chercher pour l’exhiber dans le 13 heures d’Antenne 2 un disciple assez servile pour expliquer que :

« La loi de 1981 abaissant l’âge de la retraite à 60 ans est une loi très antisociale, attendu qu’elle améliore la condition de ceux qui devaient travailler jusqu’à 65 ans sans rien apporter à ceux qui bénéficiaient déjà de la retraite à 50 ou 55 ans. »

Eblouissant, non ? Tellement qu’ils n’ont pas osé le repasser au 20 heures.

En logique, ce genre de raisonnement bancal s’appelle un sophisme et fait l’objet d’un article hautement lumineux de Wikipédia :

http://fr.wikipedia.org/wiki/Sophisme

qui vous éclairera mieux que celui du dictionnaire que vous ne pouvez consulter puisqu’il vous sert à caler l’antenne de la télé au-dessus de l’armoire.

Tout illuminé qu’il soit, l’auteur de ce chef d’œuvre logique ne m’a pas éclairé sur les arcanes de sa pensée profonde.


Peut-être pourrait-on faire appel aux lumières de quelques thuriféraires du grand prêtre comme Steevy ou Mireille Mathieu pour nous aider à élever nos modestes comprenettes à la quintessence de la pensée élyséenne ?

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Au nombre des bénéficiaires de ces régimes spéciaux, outre les cheminots et les machinistes de la RATP, on compte quelques espèces en voie de disparition comme les marins pêcheurs et les mineurs de fond, quelques petits malins comme les clercs de notaire, et….. les députés.

L’un d’eux a d’ores et déjà pris les devants. Il s’agit de Claude Goasguen, député UMP du sud du 16° arrondissement de Paris, ce quartier sensible qui comprend Auteuil, Passy, Molitor, la rue Michel Ange et ses villas, l'avenue Mozart, la Maison de la Radio, le Parc des Princes et Rolland Garros. Consulté sur la comète, il explique doctement que « les députés ne bénéficient pas à proprement parler d’un système de retraite, mais plutôt d’une sorte d’indemnité… »

D’ailleurs, puisque l'heure est aux sophismes, s’agit-il « à proprement parler » d’un boulot ?

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2 commentaires:

Anonyme a dit…

Hum...
Oui, je suis l'un de ces petits malin" comme tu le dis. Et c'est bien vrai que notre caisse largement exédentaire, était zieuté depuis fort longtemps par les gouvernements pour récuperer le surplus. Oui, faisons du social-égalitaire... J'adore la devise républicaine.
Non, le sophisme n'est pas un boulot, mais bien une simple pratique politicienne du verbe.

Jacques de Brethmas a dit…

C'est de "député" que je me demandais s'il s'agissait bien d'un "boulot" attendu que leurs "indemnités" ne seraient pas des "retraites"...

Ceci dit, je m'interroge:
Toute excédentaire qu'elle soit, la caisse des retraites des clercs de notaire n'est tout de même pas un pactole considérable, au regard du nombre de clercs de notaire.

Je suis surpris qu'elle soit à ce point convoitée par l'autorité centrale pour renflouer le système général où -sauf son respect-, elle ne représentera qu'une goutte d'eau dans l'océan...

Par ailleurs, puisque tu dénonces le "social-égalitaire" - qui n'est pas forcément la panacée du social mais bien davantage le spectre exhibé par ceux qui ne veulent pas de social du tout, pourquoi avoir entassé vos précieuses noisettes dans le tronc commun au lieu de vous être constitué un bon petit fond de placement des familles? Parce que s'il y a effectivement problème à abandonner les petits salaires à un tel système qui suppose une gestion personnalisée compétente, il n'a tout de même jamais été interdit!

Pour ma part, j'ai travaillé toute ma vie dans le spectacle, c'est à dire aux heures où les autres mangent et se reposent, sans soirées à la maison, sans dimanches et sans jours fériés, et je suis au régime général...

Enfin, l'un de mes prochains articles sera sur la contradiction qui existe entre les exigences du MEDEF à faire travailler les gens jusqu'à l'âge de la décrépitude alors que les employeurs sont de moins en moins capables de les conserver jusqu'à 60 ans. La moitié de la tranche 57/60 ans est aujourd'hui au chômage, et dispose -ce qui fut mon cas- d'une dispense de recherche d'emploi, tant il semble illusoire de trouver un emploi après 55 ans. (et même 50...)

S'ils veulent nous imposer la "méthode américaine" qui consiste à faire travailler les gens jusqu'à plus d'âge, ils faut d'abord qu'ils nous montrent que c'est possible en les embauchant !

A mon humble avis, ça grèvera la branche médicale de bien plus que ça soulagera la branche retraite...

Il y a loin des discours aux actes!