jeudi 18 décembre 2014

493° Out, ma chère…






Le « outing » de Florian Philippot déclenche un débat très animé dans la médiasphère. Les Inrocks pensent que cette révélation peut faire bondir la carrière du vice-président du Front national. Je n'en suis pas si sûr. Derrière la façade du FN ravalée par Marine et son entourage, il reste la caserne des légionnaires avec son noyau dur idéologique et son obscurantisme à œillères.

La Figaro pense, lui, que cet avatar pourrait profiter au Front national en lui amenant de nouveau électeurs. Je ne sais pas si cela arrange aussi cet employeur de Zemmour, mais dans la chienlit actuelle, n'importe quel chien écrasé peut profiter au Front national, pourvu qu'un zélé sectateur sache improviser un boniment pour en vendre la charogne.

Le magazine Têtu n'est pas défavorable à cet outing. Il souligne fort justement que l'égalité de traitement voulue et obtenue par les LGBT doit être regardée dans toute l'acception du terme, et que dans la mesure où l'on sait qui fréquente qui chez les hétéros, on ne voit plus pourquoi les homosexuels seraient exonérés de vie publique.

La justice ne s'y est pas trompée, qui, il y a exactement un an, a débouté Steve Briois, maire d'Hénin-Beaumont, lequel avait porté plainte pour avoir été « outé » dans un livre, au motif que  « le droit du public à l'information prime sur le respect de certains éléments de sa vie privée ». 




Florian Philippot réclame 50 000€ de dommages et intérêts à Closer. Ne préjugeons pas des décisions de justice, mais à la lumière de la jurisprudence ci-dessus, il est peu probable qu'il les obtienne.

La démarche de l'outing, dans l'absolu, est également l'objet de débats énergiques sur la place publique. La presse de gauche est plutôt contre : Le Canard Enchaîné et le Nouvel Observateur se sont prononcés clairement contre au titre du sacro-saint respect de la vie privée. Mais en oubliant, autant l'un que l'autre, de disserter de la valeur comparée des « vies privées » des hétéros et des homos à la lumière des récentes avancées des libertés.

J'essaie pour ma part de prendre un peu de hauteur, et de considérer d'une manière globale la position, en pleine évolution, des homosexuels dans la société française.
Reconnaissons à Florian Philippot de n'avoir jamais tenu personnellement de propos homophobe. Homophile non plus, d'ailleurs. Le débat a bouleversé le pays sans qu'il n'émette le moindre avis sur la question. 

Mais tout de même, il est vice-président d'un parti dont le chef a inventé le terme de « sidaïque » en décrivant les homosexuels, a déclaré que l'homosexualité « constituait une anomalie biologique et sociale », dont la présidente a suggéré d'étendre le mariage gay à la polygamie.

Marion le Pen, petite fille du Chef et nièce de la présidente, a défilé à la manif pour tous, et on n'a jamais entendu un seul édile frontiste soutenir tout ou partie de la cause LGBT. Ce ne sont qu'au mieux des condamnations et au pire des injures.

L’extrême droite, ou disons la droite de la droite pour ne pas risquer un procès, qui a troqué au fil de l'histoire l'antisémitisme pour l'anti-islamisme, espère aujourd'hui recruter des homosexuels en leur faisant croire que c'est dans les "banlieues maghrébines" que réside la cause de tous leurs maux…


Cela me semble un peu simpliste. Et même très très simpliste...

Certes, il y a dans les banlieues le même problème d'homophobie que partout ailleurs, mais les premières victimes en sont les habitants eux mêmes… 





Sans jamais avoir été gravement agressé, j'ai essuyé au cours de ma vie pas mal d'algarades dues à mon homosexualité, et tant sur la voie publique qu'au travail, cela a toujours été le fait de « fachos en loden » et de bons français bien de chez nous. Et dans la foule de la manif pour tous, on ne voyait pas beaucoup d'habitants des cités : c'est la crème de nos plus belles banlieues et de nos provinces profondes qui y était majoritairement représentée.

Alors, pour en revenir au « cas Philippot », qui réclame 50 000€ de dommages et intérêts pour atteinte à une vie privée que le caractère public de ses fonctions lui conteste d'ailleurs, il est tout de même permis de se demander combien de vies privées homosexuelles les discours haineux et homophobes des membres de son parti ont bien pu saccager…
Certes, il ne les a pas prononcés lui-même. Mais il a adhéré à un parti connu pour ses prises de position sur le sujet, a travaillé à le développer et à le rendre crédible jusqu'à en devenir vice-président… S'il n'est pas coupable au premier degré, on peut tout de même se demander s'il n'est pas un peu complice ?… 

Qu'un homosexuel prenne une part si active dans le développement d'un mouvement à ce point discriminateur, cela ne respire pas vraiment la probité. Cela a même une puissante odeur d'arrivisme forcené.

Combien de vies les discours homophobes ont-ils saccagé, combien d'agressions ont-ils inspiré, légitimé, combien de suicides ont-ils provoqué, quelle est leur part dans le courant homophobe qui traverse le pays ? 




Est-ce vraiment une « faute morale » de le confronter aux opinions communautaristes et aux incitations à l'exclusion et à la discrimination dont son parti est porteur ? Qu'il s'explique donc avec le « noyau dur » de ses co-listiers… 

La contestation interne a déjà commencé : en tapant « Philippot » sur Google-images, on trouve sa photo retouchée en travesti sur un site de droite bien dure dont je ne vous donnerai pas l'adresse ici….

Je ne suis tout de même pas le seul Français qui n'accepterait pas d'être membre d'une association ou d'un parti dont le discours exclut tout ce que je suis et renie mes droits et jusqu'à mon existence d'homme libre. J'ai déjà démissionné de certaines associations pour des désaccords moins fondamentaux que celui-là.

Les Français attendent de la transparence et de la probité de leurs édiles. Ce n'est pas avec ce genre de contradiction que le Front national va les séduire.





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