lundi 27 novembre 2017

558° Qui manipule qui ?






L’actualité nous apporte deux cas de rapports sexuels avec des mineurs auxquels la justice a répondu en appliquant les lois à la lettre, et tous les moralistes de salon et les ligues de vertu découvrent à cette occasion que « majorité sexuelle » et « âge du consentement » sont des notions différentes, et qu’en cas d’actes sexuels avec un mineur de 15 ans, on pouvait être poursuivi pour « atteinte sexuelle avec un mineur de quinze ans » mais pas pour viol si le mineur était consentant.

Rappelons que la définition du viol exige que soient réunis deux éléments indispensables :
1° la pénétration (de n’importe quelle manière)
2° l’usage de la force ou de la contrainte.

A partir de là, les ligues de vertu et les pétitionneurs de tous poils se sont enflammés et veulent introduire dans la loi la notion de « manipulation », jusqu’ici réservée à l’appréciation des juges.


 
Il y a quelques semaines, un enseignant a été condamné pour « atteinte sexuelle » sur une de ses élèves de moins de quinze ans, mais pas pour viol, attendu que la jeune fille a spontanément déclaré au juge qu’elle était tout à fait consentante pour une aventure dénudée.

Les ligues de vertus et les bons bourgeois pour qui la sexualité n’est plus qu’un souvenir se sont ému. Ils n’ont évidemment pas lu le dossier, n’ont pas entendu les impétrants, ne savent rien de l’affaire, mais eux, ils ont déjà jugé.

Ils ont fait tant de bruit, tant de pétitions, tant invoqué « le bon sens », ( le sens commun, c’était déjà pris…) qu’ils ont décidé ministres et présidents, toujours attentifs à la rumeur populaire à légiférer sur le sujet..

Leur plan, c’est : « En dessous de quinze ans, on ne peut pas être consentant, le sexe, on ne sait pas ce que c’est, les adultes pensent et parlent pour vous ». Et ce sont, bien entendu, les adultes castrateurs qui ont la parole.

Pour eux, on peut avoir son bac à quinze ans, pas de problème, mais pour décider de ce dont on a envie et de la personne à qui on veut se donner, on devient incompétent. Et on veut en faire une loi. Et les politiques, toujours prompts à la complaisance envers les grandes familles et les beaux quartiers, ont immédiatement mis un tel projet de loi sur leur bureau.

Cela me rappelle, à moi, des souvenirs d’enfance. A treize ans, ayant épuisé les possibilités offertes par mon entourage scolaire, j’allais tirer des sonnettes et écumer les jardins publics, (à l’époque généreusement pourvus de hautes frondaisons et de vespasiennes), pour trouver des partenaires qui avaient plus et mieux à offrir que mes camarades de classe et les fils et filles des voisins. Et là, je peux vous dire qu’il n’y avait pas besoin de les « manipuler », j’obtenais des réponses immédiates, - oui ou non-, mais avec suffisamment de « oui » pour ne pas avoir besoin de manipuler les « non ».

Là où ça devenait compliqué, c’est lorsque je voulais sortir de ma tranche d’âge (par le haut, bien sûr) pour accéder au permis poids lourds et à l’enseignement supérieur. Les lois étaient durement appliquées, et les partenaires sollicités, pour la plupart, avaient peur du gendarme et se dérobaient à mes avances. Je me souviens de la rage et de la frustration qui m’étreignaient lorsque l’un d’eux, malgré le caractère enchanteur et bien explicite de mes propositions, se dérobait au plaisir.

J’étais le demandeur, mais c’est moi qui devais les « manipuler » pour obtenir les faveurs que j’attendais.

Ce midi, je vois à la télévision un retour sur cette affaire qui occupe l’actualité. Devant le concert de pétitions, les hurlements des lignes de vertu et l’écoute intéressée des politiques, les parents de la jeune fille ont fait appel de la décision du juge en affirmant qu’elle avait été « manipulée ».
Ils ont même du être assez pressants avec elle pour lui faire déclarer à la télévision le contraire de ce qu’elle avait spontanément dit au juge, à savoir qu’elle avait bien été « manipulée ».

Mais comme elle est un peu timide devant la camera, c’est sa mère qui parle à sa place pour bien expliquer que sa fille a été manipulée par son professeur, et que si la chérie avait changé d’avis depuis ses déclarations au juge, ce n’était sûrement pas parce qu’elle l’avait elle-même « manipulée ».

Pour elle, ça tombait sous le bon sens, pour ne pas dire « le sens commun ». 
 

 
Voilà l’affaire relancée, la cour d’appel saisie, et une nouvelle vague de pétitions d’indignation et de pieux cortèges de douairières qui s’apprêtent à débouler.

Les mal-baisants veulent imposer l’égalité par le bas. Ce sont déjà eux qui parlent volontiers de pédophilie à propos d’adolescents bien pubères qui ont tous les moyens de s’envoyer en l’air alors que eux, ne peuvent plus. Non contents de vouloir se rendre maître des corps, ils prétendent maintenant s’emparer des esprits, et imposer, « au nom de leur nature », ou plutôt de sa vacuité,  de nouvelles définitions des choses de la vie.

Ce sont les mêmes, qui hurlent à la manipulation des mineurs devant la chose sexuelle, qui ont traîné leurs enfants à la manif pour tous sans avoir eu une seconde le sentiment de les manipuler.
La manipulation, ça leur va très bien quand c’est eux qui tirent les ficelles, mais ça leur devient insupportable quand ce sont la nature et la logique qui s’expriment.


 
Je vois déjà poindre les tombereaux d’injures que je vais recevoir pour avoir exprimé mon bon sens à moi, qui est accessoirement aussi le bon sens de la nature. Les castrateurs et autres malades de la pudibonderie n’ont que l’injure à la bouche : c’est là tous les arguments qu’ils peuvent aligner devant les évidences.

Nous sommes dans une époque de retour de l’ordre moral. J’ai lutté toute ma vie pour qu’on cesse de confondre morale et ordre moral. Un dogme n’est pas la vérité.

Nous avons obtenu quelques compensations cosmétiques : la pénalisation de l’homophobie, le droit au mariage, des choses importantes, certes, mais qui ne sont que des hochets dans le grand magasin des libertés.

Parce que le travail de sape du bonheur, lui, se fait sur le fond. Sournoisement.
Ce sont les ligues de vertu américaines qui dépensent des fortunes pour convaincre d’homophobie d’état les pays « du tiers monde », en leur faisant croire que la modernité à laquelle ils aspirent va de pair avec la ringardisation de leurs coutumes.



Ce sont les dictateurs qui se multiplient à travers la planète, qui ont toujours besoin d’un bouc émissaire pour asseoir leur domination et qui sont à la recherche de nouvelles cibles.

Ce sont les ligues de vertu qui expriment la jalousie de l’establishment qui s’est bêtement interdit la grivoiserie en partageant son pouvoir avec les églises et crève maintenant de frustration en voyant les classes populaires s’envoyer en l’air.

Bon allez, j’ai dit ce que j’avais à dire. J’ouvre le parapluie, envoyez les injures.








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