L’actualité nous
apporte deux cas de rapports sexuels avec des mineurs auxquels la
justice a répondu en appliquant les lois à la lettre, et tous les
moralistes de salon et les ligues de vertu découvrent à cette
occasion que « majorité sexuelle » et « âge du
consentement » sont des notions différentes, et qu’en cas
d’actes sexuels avec un mineur de 15 ans, on pouvait être
poursuivi pour « atteinte sexuelle avec un mineur de quinze
ans » mais pas pour viol si le mineur était consentant.
Rappelons que la
définition du viol exige que soient réunis deux éléments
indispensables :
1° la pénétration
(de n’importe quelle manière)
2° l’usage de la
force ou de la contrainte.
A partir de là, les
ligues de vertu et les pétitionneurs de tous poils se sont enflammés
et veulent introduire dans la loi la notion de « manipulation »,
jusqu’ici réservée à l’appréciation des juges.
Il y a quelques
semaines, un enseignant a été condamné pour « atteinte
sexuelle » sur une de ses élèves de moins de quinze ans, mais pas
pour viol, attendu que la jeune fille a spontanément déclaré au
juge qu’elle était tout à fait consentante pour une aventure
dénudée.
Les ligues de vertus
et les bons bourgeois pour qui la sexualité n’est plus qu’un
souvenir se sont ému. Ils n’ont évidemment pas lu le dossier,
n’ont pas entendu les impétrants, ne savent rien de l’affaire,
mais eux, ils ont déjà jugé.
Ils ont fait tant de
bruit, tant de pétitions, tant invoqué « le bon sens »,
( le sens commun, c’était déjà pris…) qu’ils ont décidé
ministres et présidents, toujours attentifs à la rumeur populaire à
légiférer sur le sujet..
Leur plan, c’est :
« En dessous de quinze ans, on ne peut pas être consentant, le
sexe, on ne sait pas ce que c’est, les adultes pensent et parlent
pour vous ». Et ce sont, bien entendu, les adultes castrateurs
qui ont la parole.
Pour
eux, on peut avoir son bac à quinze ans, pas de problème, mais pour
décider de ce dont on a envie et de la personne à qui on veut se
donner, on devient incompétent. Et on veut en faire une loi. Et les
politiques, toujours prompts à la complaisance envers les grandes
familles et les beaux quartiers, ont immédiatement mis un tel projet
de loi sur leur bureau.
Cela me rappelle, à
moi, des souvenirs d’enfance. A treize ans, ayant épuisé les
possibilités offertes par mon entourage scolaire, j’allais tirer
des sonnettes et écumer les jardins publics, (à l’époque
généreusement pourvus de hautes frondaisons et de vespasiennes),
pour trouver des partenaires qui avaient plus et mieux à offrir que
mes camarades de classe et les fils et filles des voisins. Et là, je
peux vous dire qu’il n’y avait pas besoin de les « manipuler »,
j’obtenais des réponses immédiates,
- oui ou non-, mais avec
suffisamment de « oui » pour ne pas avoir besoin de manipuler les « non ».
Là
où ça devenait compliqué, c’est lorsque je voulais sortir de ma
tranche d’âge (par le haut, bien sûr) pour accéder au permis
poids lourds et à l’enseignement supérieur. Les lois étaient
durement appliquées, et les partenaires sollicités, pour la
plupart, avaient peur du
gendarme et se dérobaient
à mes avances. Je me souviens de la rage et de la frustration qui
m’étreignaient lorsque l’un d’eux, malgré le caractère
enchanteur et bien
explicite
de mes propositions, se dérobait au plaisir.
J’étais
le demandeur,
mais
c’est moi qui devais les « manipuler » pour obtenir les
faveurs que j’attendais.
Ce
midi, je vois à la télévision un retour sur cette affaire qui
occupe l’actualité. Devant le concert de pétitions, les
hurlements des lignes de vertu et l’écoute intéressée des
politiques, les parents de la jeune fille ont fait appel de la
décision du juge en affirmant qu’elle avait été « manipulée ».
Ils
ont même du être assez pressants avec elle pour lui faire déclarer
à la télévision le
contraire de ce qu’elle avait spontanément dit au juge, à savoir
qu’elle avait bien été
« manipulée ».
Mais
comme elle est un peu timide devant la camera, c’est sa mère qui
parle à sa place pour bien expliquer que
sa fille a été manipulée
par son professeur, et que si la
chérie avait changé
d’avis depuis ses déclarations
au juge, ce n’était
sûrement pas parce qu’elle l’avait elle-même « manipulée ».
Pour
elle, ça tombait sous le bon sens, pour ne pas dire « le sens
commun ».
Voilà
l’affaire relancée, la cour d’appel saisie, et une nouvelle
vague de pétitions d’indignation et de pieux cortèges de
douairières qui s’apprêtent à débouler.
Les
mal-baisants veulent imposer l’égalité par le bas. Ce sont déjà
eux qui parlent volontiers
de pédophilie à propos d’adolescents bien pubères qui ont tous
les moyens de s’envoyer en l’air alors que eux, ne peuvent plus.
Non contents de vouloir se rendre maître des corps, ils prétendent
maintenant s’emparer des esprits, et imposer, « au nom de
leur nature », ou plutôt de sa vacuité, de nouvelles définitions des choses de la vie.
Ce
sont les mêmes, qui hurlent à la manipulation des mineurs devant la
chose sexuelle, qui ont traîné leurs enfants à la manif pour tous
sans avoir eu une seconde le sentiment de les manipuler.
La
manipulation, ça leur va très bien quand c’est eux qui tirent les
ficelles, mais ça leur devient insupportable quand ce sont la nature
et la logique qui s’expriment.
Je
vois déjà poindre les tombereaux d’injures que je vais recevoir
pour avoir exprimé mon bon sens à moi, qui est accessoirement aussi
le bon sens de la nature. Les castrateurs et autres malades de la
pudibonderie n’ont que l’injure à la bouche : c’est là
tous les arguments qu’ils peuvent aligner devant les évidences.
Nous
sommes dans une époque de retour de
l’ordre moral. J’ai lutté toute ma vie pour qu’on cesse de
confondre morale et ordre moral. Un dogme n’est pas la vérité.
Nous
avons obtenu quelques compensations cosmétiques : la
pénalisation de l’homophobie, le droit au mariage, des
choses
importantes, certes, mais qui ne sont que des hochets dans le grand
magasin des libertés.
Parce
que le travail de sape du bonheur, lui, se fait sur le fond.
Sournoisement.
Ce
sont les ligues de vertu américaines qui dépensent
des fortunes pour convaincre d’homophobie d’état les pays « du
tiers monde », en leur faisant croire que la modernité à
laquelle ils aspirent va de pair avec la ringardisation de leurs
coutumes.
Ce
sont les dictateurs qui se multiplient à travers la planète, qui
ont toujours besoin d’un bouc émissaire pour asseoir leur
domination et qui sont à la recherche de nouvelles cibles.
Ce
sont les ligues de vertu qui expriment la jalousie de l’establishment
qui s’est bêtement interdit la grivoiserie en partageant son
pouvoir avec les églises et crève maintenant de frustration en
voyant les classes populaires s’envoyer en l’air.
Bon
allez, j’ai dit ce que j’avais à dire. J’ouvre le parapluie,
envoyez les injures.
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