dimanche 11 mai 2014

478° Au nom du fils et Conchita Wurst







Les homophobes font de l'urticaire cette semaine. Pas seulement les homophobes français qui sont les seuls européens à s'être insurgés contre le mariage pour tous et dont, avec le temps, les séquelles ne sont plus partagées que par quelques handicapés et hypocrites du calbut, mais l'internationale européenne des reproducteurs-non-jouisseurs qui voient les variations du plaisir sexuel étinceler en mille étoiles comme une belle fusée de feu d'artifice.




Film de Vincent Lanoo, belge, 2014, déjà un prix et six nominations.

Le film-annonce laisse présager un serial-massacre à la Tarantino. Il n'en est rien. Oui, il y a pas mal de coups de feu, mais ils ne sont ni le sujet ni l'intérêt du film. Le seul qui ait une véritable importance, et qu'on ne voit pas, est celui par lequel le fils de 14 ans d'une famille catho-bourgeoise se suicide en constatant qu'il ne peut pas vivre son homosexualité. 




Le scénario est une bombe à fragmentation qui tire des fusées éclairantes dans la nuit de la désinformation et de l'obscurantisme. Il dénonce tout à la fois l'intégrisme catholique avec ses relents racistes et ses velléités de croisades et de ratonnades, l'instrumentalisation de l'homosexualité par une extrème-droite sans scrupules, qui la dénonce et la pratique tout à la fois, la complicité de la hiérarchie catholique qui vend sa pseudo-chasteté comme une valeur marchande en protégeant ses prêtres pédophiles, la désinformation destructrice -genre manif-pour-tous-, qui réduit au suicide les adolescents enfermés dans l'ordre moral et qui se découvrent homosexuels, et cloue également au pilori la rapidité des ecclésiastiques à traiter de « petite tapette efféminée » les garçons dont ils ont joui dès lors que ceux-ci cessent d’assumer le rôle de jouet sexuel qu'ils leur avaient assigné…

C'est dire que le dégoût qu'inspire le film n'est pas provoqué par la vue de quelques cadavres ensanglantés, que le plus humaniste des spectateurs n'arrive pas à plaindre vraiment tant ils incarnent l'ignominie et l'imposture.

Le film, malgré son côté violent, est au contraire quasiment jouissif par la qualité de son humour, par le recul de documentariste que prend le réalisateur face à ce qu'il décrit, et aussi par la qualité de son écriture, car Lannoo, qui a fait une école de cinéma, -et ça se sent-, a une écriture classique, une image recherchée sans aventure, un montage rigoureux et expressif, et livre un film léché, qui va droit au but, avec une ambiance générale « Chatilliez » (la famille belge ressemble aux Lequesnoy de « La vie est un long fleuve tranquille »), affublée de la même ridicule incapacité dans la gestion des situations, de la même impossibilité de parler des choses sérieuses, et gouvernée par les mêmes certitudes métaphysiques qui la déconnecte désespérément de la vie quotidienne. 





Traiter le drame par l'humour. Voilà ce qui fait d' « Au nom du fils » un petit bijou de cinéma.
C'est sans doute ce qui explique que Civitas ait fait des pieds et des mains pour l'empêcher de trouver des écrans.
Car Civitas et consorts n'ont toujours pas compris que brandir la censure revient toujours à donner aux œuvres menacées une publicité gratuite qui est le contraire de leur objectif. Dieu a bien donné la bêtise à l'homme, et ce sont logiquement ses plus proches serviteurs qui en ont été les mieux lotis. 








Sans doute Conchita Wurst, de son vrai nom Thomas Neuwirth avait-il quelques chances de gagner le grand prix de l'Eurovision parce qu'il est un bon chanteur, habité par sa vocation depuis l'âge de 14 ans, qui a suivi tous les cours et formations nécessaires, et s'est déjà présenté à de nombreux concours locaux avec des succès appréciables. Le travail et la passion finissent toujours par payer.

Ce qui a lui donné le coup de pouce décisif dans ce concours où les talents ne manquaient pas est sans doute sa personnalité de drag queen. Il n'est pas transexuel et n'y songe pas : il est garçon, satisfait de son état et fier de l'être. Le petit plus qui a transformé la qualité de sa prestation en triomphe est, là encore, sans doute un retour de manivelle de la censure.

Les homophobes en ont trop fait, raconté trop de conneries, proféré trop de menaces, provoqué trop de suicides, brisé trop de familles, fait trop de dégâts. Tôt ou tard, une lame de fond devait répondre au séisme. D'où entre autres, la hola de mariage pour tous qui déferle sur la planète en moins d'une décennie, d'où les triomphes à la Conchita...

Les lois scélérates anti-homosexuelles qui compromettent l'émancipation de l'Afrique, renvoient les pays du golfe au moyen-âge malgré leur richesse, replient la Russie sur elle-même en la marginalisant du concert des nations, la lapidation des homos votée au sultanat de Brunei qui fait à elle seule plus de mal à l'image de l'Islam que toutes les bonnes intentions des musulmans du reste du monde, tout cela déclenche des réflexes humanistes dans les pays bénéficiant encore de démocratie. 





Rappelons pour la petite histoire que « Wurst » n'est pas un mot anodin : en allemand, il signifie « saucisse ». Et cela va bien au-delà de l'allusion : c'est le mot le plus usuel, notamment utilisé par les écoliers, pour désigner l'organe viril. Un mot familier, mais nullement vulgaire. L'équivalent de notre « zizi » chanté avec tant de délicatesse par Pierre Perret. Vous saurez tout sur le Wurst.

On a déjà oublié que Conchita n'est pas la première lauréate de l'Eurovision à présenter un genre inhabituel.  Un précédent grand prix de l'Eurovision avait, en 1998 , été remis à un transexuel Israélien, Dana.


Mais Dana ne se distinguait que par son histoire, pas par son aspect. L'immanente sagesse populaire, qui réagit parfois un peu tard, mais néanmoins toujours, a frappé un coup plus fort.
Elle porte aujourd'hui une femme à barbe au pinacle. Aux homophobes d'en parachever l'aboutissement publicitaire. Ils ont déjà commencé : avant même le concours, ils ont tenté de l'empêcher de participer, de récuser sa candidature, comme s'il chantait avec son sexe.

Merci à vous, ringards homophobes, de donner à ce prix de l'Eurovision une ampleur médiatique que les autres n'atteignent pas. Celui-là est un symbole : on vous l'a agité sous le nez, et vous avez mordu.

Vive la liberté.


mercredi 7 mai 2014

477° l'UMP, plus fort que le Gorafi.







Deux sites parodiques :


se sont donné pour mission d'illustrer les divagations de la droite la plus bête du monde (Cocorico, c'est du made in France), mais parfois, ces pauvres droitistes disent et font tellement de conneries que point n'est besoin de les caricaturer pour se marrer un bon coup.

C'est ce qui vient de se produire cette semaine : l'UMP a nommé un « monsieur lutte contre l'homophobie ». C'est Emmanuel Blanc, qui erre depuis longtemps entre les militants de l'égalité des droits et les murailles réactionnaires de la droite sans jamais arriver à se ranger vraiment d'un côté ou de l'autre.

Un peu d'histoire :

Président de GayLib  en 2011, le « mouvement gay associé à l'UMP » , Emmanuel Blanc essuie vent sur vent de la part du parti dont il se revendique à cors et à cris avec une pitoyable obstination. Il voit le char de Gay Lib bloqué place de la Bastille par les militants de l'égalité lors de la Marche des Fiertés du 25 juin.

Pourtant, il persiste et signe : « Nous ne quitterons pas l'UMP! »  déclare-t-il à la presse.

Dans les mois suivants, il essuie des motions internes réclamant « l'exclusion de GayLib de l'UMP » et ne trouve toujours aucun moyen de discussion. Essayer de draguer quelques bulletins de vote homosexuels, l'UMP veut bien, mais dans la discrétion et sans aucune contrepartie.

Le 12 janvier 2012, il n'est plus président de GayLib. Catherine Michaud l'a remplacé. L'UMP reste un bastion homophobe imprenable, même si, pour éviter les éclaboussures, le parti a retiré son investiture à Christian Vanneste en avril 2012.



Gay Lib, qui voit défiler des députés UMP avec la Manif pour tous, se rend enfin à la raison, et quitte, la mort dans l'âme, cette UMP dont elle squattait le paillasson depuis des années. 

On pensait les acoquinades des gays et de la droite enfin terminées. Copé demande solennellement le retrait de la loi Taubira,  , François Fillon veut vider la loi de son sens,  les coteries, pétitions et alliances se multiplient au sein du parti contre le mariage pour tous sous la houlette du très activiste député UMP de la Drôme Hervé Mariton, les déclarations anti-gay fusent : Laurent Vauquiez, député de la Haute Loire, Philippe Gosselin, député de la Manche, et plein d'autres moins tapageurs, mais néanmoins fortement convaincus.

Un mouvement concrétisant le lien entre la manif pour tous et l'UMP, Le sens commun,  est lancé à grand tapage et champagne, au siège même du parti, le 20 décembre 2013. Un machin présidé par Sébastien Pilard, leader de la manif pour tous dans le grand ouest.



Homophobie ou pas ?


J'allais dire « La question se pose ». En fait, non, elle ne se pose pas. Ce sont eux qui la posent, pour essayer d'y répondre comme ça les arrange. Ils tentent de persuader la fluctuante conscience politique des Français de ce que s'opposer au mariage pour tous ne serait pas de l'homophobie.

Si, c'en est. C'est bien une discrimination caractérisée. Vouloir retirer à certains citoyens, au regard de leur préférence sexuelle, un droit acquis à tous les autres,   c'est le retour du triangle rose.

Le droit républicain, c'est pour tous les citoyens. Si une discrimination visait les Juifs, tout le monde, même à l'UMP, s'accorderait à dire que ce serait de l'antisémitisme. Mais si cette discrimination vise les homosexuels, ce n'est pas de l'homophobie ? Une discrimination qui n'aurait plus de nom ? Qu'on glisse sous le tapis ?

Le discours politique ne peut méconnaître la logique la plus élémentaire. Sinon, il devient de la propagande, et on sait à quoi cela conduit.


©MAXXPPP

Cette dérive homophobe étant établie, revenons aux dernières élucubrations des ténors de l'UMP.

Une majorité de Français reste favorable au mariage pour tous. En s'y opposant, l'UMP a donc fait le mauvais choix. Il faut donc revenir en arrière, faire oublier le passé, réécrire l'histoire comme dans 1984, ramener au bercail les brebis égarées.

Et puis les faits et les chiffres sont têtus. Même s 'il y avait vraiment un million de gogos dans la rue à la manif pour tous, il y a, parmi les presque 70 millions de Français, environ 10 millions d’homosexuels, hommes et femmes confondus. Des citoyens tranquilles, mais sûrs de leur bon droit. Ajoutons à cela une majorité de Français « hétéros », dont d’ailleurs bon nombre de catholiques, favorables au mariage pour tous….

Malgré son tapage, la manif pour tous n'est donc que l'écume d'un clapotis de secte intégriste.

Alors, au diable l'idéologie, tant pis pour ses forces occultes réactionnaires, l'UMP, qui nous a habitués à naviguer à vue, vire à nouveau de bord : Revenez à nous gentils homosexuels...

Nomination, donc, d'Emmanuel Blanc, (coucou le revoilà), au poste délicat de« Monsieur lutte contre l'homophobie » à l'UMP, alors que le « pool Mariton -Gosselin » contre l'égalité des droits est plus actifs que jamais, et qu'on vide encore les poubelles des cartes des homos déchirées qui avaient malgré tout tenté l'aventure à droite. 

Un truc aussi surréaliste, même le Gorafi et l'Humour de droite ne l'avaient pas inventé. Avoir l'esprit tortueux à ce point n'est pas donné à tous les humoristes.

A l'UMP, on a embauché un homo de service. Les grandes manœuvres ont commencé, à grand renfort de pardon hypocrite, d'oubli stratégique et de repentance escamotée. Qui mordra à cet hameçon empoisonné ?