En Italie...
Le problème du « outing » donne lieu à de nombreux débats et il se pose actuellement en Italie. Il était une fois un mouvement LGBT italien qui s'appelait Arcigay, dont les rangs étaient divisés entre ceux qui voulaient bouger et ceux qui croyaient, à l'instar d'Arcadie en France dans les années 70, qu'il suffisait de fréquenter les allées du pouvoir avec de belles cravates pour voir des droits LGBT tomber du ciel comme par enchantement.
Et comme dans toutes les églises, Arcigay y croyait toujours et rien ne tombait jamais. Alors, le président de l’époque Aurelio Mancuso a quitté le commandement de troupes qui ne voulaient pas avancer pour créer un autre mouvement plus dynamique, Equality Italia, dont il est aujourd'hui le président. Mancuso prétend, - à juste titre- que les ronds de jambes et autres révérences ne font plus avancer le gay schmilblick, et que c'est en intervenant sur le terrain politique, -terreau de l’homophobie par son caractère populiste- qu'il pourra désembourber le chariot.
La politique, Aurelio Mancuso, la connaît bien puisqu'il sort de ses rangs : il a longtemps milité et tenu une place importante dans le mouvement de la gauche démocrate italienne. Et à la fin septembre, il entre en guerre et sort un blog, où il explique posément mais fermement que la démocratie ne peut pas se nourrir d'hypocrisie, que la moindre des choses que l'on peut attendre d'un élu gay est de ne pas soutenir des dispositions homophobes, et qu'il s'apprête donc à outer tous ceux qui viennent de le faire s'ils ne changent pas d'avis rapidement.
Parce que, justement, en Italie, cela vient de se produire. Le nombre des agressions homophobes , verbales et physiques monte en flèche, et un projet de loi portant aggravation des peines pour de telles agressions, -à l'instar de ce qui existe dans la plupart des pays civilisés- était arrivée sur le bureau du parlement. Et le parlement l'a rejeté le 26 juillet dernier.
Le débat s'est limité à quelques échanges de slogans : « Les homosexuels sont des Italiens comme les autres, on ne voit pas pourquoi ils seraient bénéficiaires de protections spéciales » a dit Berlusconi. « S'ils sont des Italiens comme les autres, a rétorqué Padanè, président d'Arcigay, on ne voit pas pourquoi ils seraient agressés plus que les autres », et les choses en sont resté là. Ce qui est trop peu.
Le problème est que, dans la majorité des députés qui a refusé le projet figure un bon nombre d'homosexuels, comme ce fut le cas en France en 1962 lorsque le parlement vota les amendements Mirguet à l'unanimité moins la voix d'Henri Caillavet , -hétéro-, alors que suivant Roger Peyrefitte, s'y trouvaient « au moins 11 députés notoirement homosexuels, plus ceux qu'on ne connaissait pas... ». (Des Français, Flammarion 1970).
Voilà donc l'Italie gay divisée en deux, comme le sont d'ailleurs tous les mouvements LGBT européens, entre militants de salon cramponnés au respect de la vie privée même si cela doit leur retomber sur la tête, et militants activistes qui affirment que les homophobes ne se gênent pas pour nous couvrir d'opprobres diffamatoires, d'amalgames mensongers et de contre-vérités populistes, ce qui légitime les gays à riposter en ne proclamant rien de plus que la vérité toute nue.
Ce qui me semble personnellement tout à fait fondé : je veux bien pardonner un peu de lâcheté, mais pas la trahison. Face à une mesure homophobe, un élu homosexuel vote contre « par humanisme » ou s'abstient « par lâcheté », mais il n'apporte pas de voix scélérate à nos exterminateurs.
La politique suppose un minimum de réalisme, et ne saurait se cantonner à quelques grands principes abstraits. Les lois et leur esprit, c'est bien pour une chaire de droit ou de philosophie, mais lorsqu'on les applique à une population où « ont pu se glisser quelques esprits simplets », elle est reçue comme la légitimation des actes et agressions homophobes. « Puisque ce n'est pas illégal, c'est permis ». L'explosion des agressions homophobes en Italie, soutenue par les vociférations des riches partis d’extrême droite et par les hypocrites bénédictions du Vatican donne la mesure de cette dérive.
Alors, la scène militante LGBT italienne se divise en deux : ceux qui tendent l'autre joue à l'image de la star du Vatican, et ceux qui contre-attaquent. Aurelio Mancuso quitte la tête de la complaisante Arcigay pour fonder un mouvement « Equality Italia » , décidé à « rentrer dedans ».
Je suis particulièrement sensible à ce remue-ménage, car toutes les composantes existent en France, où au moins un homme politique gay a soutenu cette année un projet homophobe. Après « mani pulite », vive l'opération « cazzi pulite ».
En Allemagne....
Joli remue ménage en Allemagne aussi, où les démocrates chrétiens font défaut à l'alliance du SPD de Merkel , qui se vautre aux élections notamment dans le land de Berlin où il réalise 1,8%, moins du tiers des 5% nécessaires pour être représenté, moins que les 2,4% du groupuscule néonazi, et alors que le « parti pirate » qui représente la liberté des internautes, réalise 8,9% des suffrages et envoie 15 députés au parlement du Land.
Mais Berlin, même s'il illustre la tendance générale des élections allemandes où Merkel et les libéraux font un fiasco, n'est pas un land comme les autres. Le maire gay, Klaus Wolvereit, y a promulgué un décret instaurant la lutte contre l'homophobie dès l'école primaire, et sort victorieux de ces élections avec la stature de devenir l'adversaire potentiel de Merkel et de ses libéraux aux prochaines élections générales de 2013, de nombreux länder ayant suivi cette tendance. Tendance européenne sans doute due à l'arrivée aux urnes d'une nouvelle génération, la droite allemande reçoit une raclée que l'on espère annonciatrice des prochaines échéances françaises, où notre droite se crispe et se ringardise, tant sur les questions LGBT que sur la gestion des inégalités.
La semaine dernière, une manifestation préventive à la venue du pape à Berlin a été repoussée par l'autorité en place. L'autorité vient de changer : attendons le traitement de la prochaine manif et de la visite à proprement parler de Mr. Ratzinger. C'est demain...
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