L 'UMP nous en veut. Pas seulement aux homosexuels, mais à la liberté sexuelle tout entière. Je vous parlais de Lionel Luca dans l'article précédent (388) , comment imaginer qu'il allait si vite faire parler de lui à nouveau?
Quand je pense qu'il existe encore de doux rêveurs, genre GayLib, qui espèrent promouvoir la liberté sexuelle et homosexuelle au sein de l'UMP. Nous mentent-ils cyniquement, ou se mentent-ils naïvement à eux-mêmes ? Bien sûr, ils vont me dire : « Luca et Vanneste, ce n'est pas toute l'UMP ». Heureusement. Mais tant que l'UMP ne les flanquera pas à la porte et continuera à reluquer avec concupiscence sur leur électorat, aucun progrès ne se fera.
Voilà notre Lionel Luca associé à Christian Vanneste, (Qui a dit « Joli couple? » Un peu de respect, je vous en prie.) Christian Vanneste, donc, grand exégète de la sexualité exclusivement reproductrice et auteur du brûlot homophobe « Homme et femme, dieu les créa » dans une proposition de loi aux motifs surréalistes et à la faisabilité inexistante.
Voilà donc treize députés (ça commence déjà plutôt mal...) qui nous pondent un projet de loi proposant que l'internet livré par les opérateurs soit purgé de toutes les « adresses pornographiques », et que celles-ci ne puissent être « optées » qu'une par une à travers le contrôle parental.
Parcourons ensemble le texte de ce projet de loi... (extraits en italique.).
Dès le paragraphe 2, le ton est donné : tentations sexuelles, perversités.... Mais qui a prétendu, sinon les dogmes religieux, que la sexualité serait une « tentation » [menant à] des « perversités » ?
Si dès les premières lignes, on confond catéchisme et éducation civique, c'est tout le texte de loi qui va partir en vrille en négligeant de prendre en compte la laïcité de la république pourtant prévue dans la constitution...
Un peu plus loin, on découvre que la consultation de la pornographie peut engendrer une « dépendance psychologique, physique et psychique » …. Certes, ça éloigne quelque peu de la fréquentation régulière des lieux de culte, (encore que...) mais le culte n'est-il pas une autre forme de dépendance psychologique et physique ? Et psychique? Pourquoi chacun n'aurait-il pas droit à ses petites habitudes tant qu'elles ne concernent que lui???
« La pornographie s'étend de manière silencieuse dans la société et affecte toutes les classes d'âge », peut-on lire un peu plus loin. Ah bon ? Elle touche aussi les enfants... « Leur esprit se construit à partir de ce qui est virtuel... »...
Moi, je dirais plutôt : « La frustration sexuelle et tous les dérèglements et abus qu'elle engendre s'étendent de manière silencieuse dans la société et affectent toutes les classes d'âge »...
Alors, comment se construisaient nos têtes blondes avant l'informatique ? C'est bien connu, avant l'ère informatique, il n'y avait pas de viols, pas d'attentats à la pudeur, pas de crimes sexuels, pas d'homosexuels non plus ? Comme chez Ahmadinedjad ? On vivait dans le monde de Oui-oui ? Ou dans celui de Non-non ?
« C’est un peu comme si toute la réalité du monde, à travers toutes ses dimensions, était exposée aux enfants sans étape préalable, sans ordre, sans explication, sans morale quelconque » Comme si la situation antérieure était plus explicite ? Dans l'immense majorité des familles, on ne parle pas de sexe, et plus les lycées et collèges sont conformes aux vœux des auteurs du projet, moins on y dispense d'éducation sexuelle. Les enfants et adolescents sont livrés à eux-mêmes en ce qui concerne la préparation aux choses du sexe. Là, sans doute, il y a un problème. Mais ce n'est pas la pornographie qui va le résoudre, ni par sa présence ni par son absence.
Et petit à petit, bien plus insidieusement que la pornographie ne s'introduit dans les foyers, la voilà qui « pousse à démystifier ce type d’information ». Ah, parce que le sexe est un mythe ? Moi, je croyais que c'était une chose tout à fait naturelle. Je me trompais. ? Bien avant « l'invasion pornographique d'internet», on faisait des travaux pratiques après l'école avec les petit(e)s camarades. Ça valait bien quelques vidéo floues glanées sur internet, non ? Mais question information et pédagogie, ce n'était ni mieux ni pire.
Le projet de loi nous explique qu'internet « banalise » la chose sexuelle, et que cela conduit à des délits et des crimes. Or non seulement les délits existaient avant la pornographie, (et sans doute de manière bien plus fréquente et moins réprimée), mais je prétends, moi, que si la sexualité était banalisée, elle ne serait pas, comme tout interdit, l'objet de frustrations qui elles, conduisent au débordement. Il y a tout un débat à tenir sur le rôle d'exutoire utile de la pornographie et également de la prostitution dont les penseurs à la mode ne veulent pas entendre parler.
Et cette castration sociétale gagne comme une gangrène : le programme du parti socialiste pour les prochaines présidentielles prévoit de poursuivre les clients des prostituées en justice, au lieu de réglementer le domaine et de se soucier du devenir des travailleurs du sexe.
Résultat prévisible : l'activité va « prendre le maquis » et s'exposer davantage à la main-mise des gangs et mafias, le nombre de chantages, divorces, de familles brisées et d'enfants déchirés va exploser comme il a explosé en Suède dans les années qui ont suivi la promulgation d'une loi aussi stupide, et de nouvelles activités vont voir le jour, comme les bateaux de croisière suédois qui vont dans la nuit passer quelques heures en dehors des eaux territoriales, là où la loi imbécile ne s'applique plus...
Mais revenons-en à nos Luca-Vanneste.
« On estime qu’aujourd’hui 80 % des adolescents ont déjà visionné des films pornographiques dont un enfant de dix ans sur trois. » Qui est « on ? ». L'annonciature ?
« De manière globale, le mot clef le plus tapé dans les moteurs de recherche est « sexe ».
Faux. Preuve à l'appui ICI.
Voilà une proposition de loi bien étrangement étayée...
Les digues submergées, le tsunami s'étend : « Or, un enfant de 6 à 7 ans (comme on en rapporte beaucoup de cas) qui visionne une scène pornographique pouvant inclure des pratiques sadomasochistes, manifeste des troubles similaires à ceux qui adviendraient s’il avait subi un abus sexuel ».
ON a encore sévi. Qui est ce « ON » qui connaît des enfants de six ou sept ans qui matent du sado-masochisme ? Je le trouve drôlement intime avec nos têtes blondes, ce monsieur ON. Car si on a trouvé des URL sado-maso dans l'historique de l'ordinateur de la maison, c'est beaucoup plus vraisemblablement parce que papa (ou maman) sont allé se distraire un peu en attendant que le chéri revienne de l'école. Lequel en général se précipite sur des sites dédiés à sa tranche d'âge avec des jeux appropriés dont on a le plus grand mal à l'arracher ensuite pour venir manger.
Je connais des adolescents accros aux jeux vidéo, je n'en connais aucun accro à la pornographie. Les législateurs semblent ici transférer leurs propres fantasmes aux enfants... Quand un ado voit un ordinateur, il pense bien davantage "jeu vidéo" que pornographie.
Au début du projet, les adolescents étaient menacés, puis les enfants de dix ans, maintenant les six à sept ans... Je m'attends à un paragraphe où on va m'expliquer qu'il faut protéger les femmes enceintes de la pornographie, puisqu’il est bien connu que certaines sensations commencent à se constituer in utero...
Je me demande aussi, sans vouloir manquer de respect à personne, comment, dans la mesure où on considère qu'un enfant qui a subi un abus sexuel présente ensuite des troubles toute sa vie, quels abus ont bien pu subir ceux qui, toute leur vie, luttent contre la liberté sexuelle, le plaisir de l'amour, l'épanouissement des sens, la libre disposition du corps et jusqu'au simple désir présenté comme une « tentation » ?
Puis vient le contre-exemple :
« D'après une étude de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) menée par Marie Choquet en 2004, la propension des filles à faire des tentatives de suicide est multipliée par deux lorsqu’elles regardent assidûment des images X. »
Marie Choquet est bien chercheuse à l'INSERM et sa production pléthorique. J'ai réussi à retrouver l'ouvrage. (Les Jeunes suicidants à l’hôpital, Paris, Éditions EDK, 2004 ).
Malheureusement, ce digest et ces articles de La Croix et du Monde ne parlent pas d'augmentation des cas du suicide en rapport avec la pornographie.
On y parle d'états d'âme, de déceptions amoureuses, de défaillance parentale et de différents autres facteurs.
Dommage aussi que le projet de loi ne parle pas de l'effroyable augmentation des suicides d'adolescents face à l'homophobie qui les empêche de s’épanouir.
http://www.scom.ulaval.ca/Au.fil.des.evenements/2005/02.17/homophobie.html
http://www.lepost.fr/article/2008/02/05/1094572_homophobie-1ere-cause-de-suicide-chez-les-ados.html
Là, les propos homophobes (enfin, monsieur Vanneste n'est pas homophobe, dit-il, il trouve juste que c'est une pratique inférieure aux autres...), bref les propos nullement homophobes de monsieur Vanneste ne sont sans doute pas étrangers à l'augmentation du nombre de ces suicides, et peut être aussi à l'augmentation des agressions homophobes en légitimant une vision péjorative de l’homosexualité dans l'opinion publique.
Bref, l'idée de la loi est de bloquer d'office toutes les adresses pornographiques par défaut et de demander aux abonnés à internet de les autoriser une par une par « opt-in ». Il existe sans doute quelques millions d'adresses pornographiques dont des milliers changent tous les jours, voilà de quoi occuper nos chômeurs!!! Évidemment absolument irréalisable. Même les Chinois, qui essaient seulement de les bloquer sans les trier avec des grands moyens que nous n'avons pas n'y parviennent pas. Je discute parfois avec des gays chinois et des gays iraniens à travers des sites où il n'y a pas que du texte...
Devant de tels non-sens, il n'est plus question de lutte contre la pornographie ni même contre la liberté sexuelle. Outre la compétence de nos édiles, ce sont les libertés individuelles les plus générales qui sont mises en causes par de tels projets.
Lutter contre de tels excès, c'est affirmer qu'on ne veut pas de Big Brother ni de novlangue ni de contrôle de la pensée, pas de 1984 où l'amour est interdit, qu'on veut pouvoir parler de tout et faire tout ce qui nous convient à la seule lumière du consentement mutuel.
Tiens, curieusement, dans 1984, le personnage de Julia est membre de la « ligue anti-sexe des juniors ». Nos législateurs s'en serait-ils inspirés ?
Dernière minute et black list:
Le site de Têtu est inaccessible sur les serveurs de l'Education Nationale.
Il est pourtant, avec e-llico, l'un des principaux sites auxquels les adolescents en butte à l'homophobie peuvent se référer et tenter de se légitimer pour ne pas se jeter par la fenêtre...
Big Brother veille.
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