« Le colonel Beltrame, il est mort parce que la France, ce sont des idées, des valeurs, quelque chose d’une guerre qui le dépasse.Les gens qui pensent que la France, c’est une espèce de syndic de copropriété où il faudrait défendre un modèle social qui ne sale plus, (sic) une République dont on ne connaît plus l’odeur et des principes qu’il fait bien d’évoquer parce qu’on s’est habitué à eux et qu’on invoque la tragédie dès qu’il faut réformer ceci ou cela, et qui pensent que, en quelque sorte, le summum de la lutte, c’est les 50 euros d’APL, ces gens-là ne savent pas ce que c’est que l’histoire de notre pays. L’histoire de notre pays, c’est une histoire d’absolu. »
Emmanuel
Macron, France 3, 7 mai 2018
On
l’appelait déjà « le président des riches », voire
« le méprisant de la république ».
Parce
qu’on est poli.
Jusqu’à
maintenant, on pensait que l’outrance, l’arrogance
et le mépris étaient le fait de quelques chefs d’états
étrangers, bien loin de nous, qu’on voyait à la télévision dans
la catégorie monstres
de foire.
On
se disait qu’on avait bien de la chance de vivre dans notre bel
hexagone, même si quelques déclarations d’édiles, ça et là,
éclataient à la surface du lac comme autant de bulles de pestilence
et présageaient d’une possible contamination par la corruption
politicienne.
Et
puis voilà, la grenouille veut se faire aussi grosse que le bœuf,
et en attendant qu’elle n’explose, on doit subir.
On
ne sait plus par où commencer pour conjurer l’infâme bricolage
idéologique de ce discours, nettoyer le parquet
du forum républicain
de cette effroyable diarrhée dialectique,
et prier l’imprécateur d’aller dorénavant faire ça dans les
chiottes avec la porte fermée s’il lui reprend l’envie
d’exprimer le fond de sa pensée.
D’abord,
l’ignominie qui
consiste à mêler
l’acte héroïque d’un soldat à la contestation des pauvres qui
demandent justice et équité.
Si
on pouvait établir un lien logique entre ces faits, ce serait
exactement dans le sens inverse de celui où Macron l’a fait. Tel
qu’il l’exprime, il salit la mémoire de ce brave colonel et
méprise des gens qui ne bouclent plus leurs fins de mois.
Si
la pensée présidentielle n’était pas à ce point dévoyée, il
aurait compris que si d’héroïques combattants avaient donné leur
vie pour le Pays, c’était justement pour que les Français
puissent y vivre dans la liberté, l’indépendance
et la suffisance de moyens matériels.
Créer
une rupture de valeurs entre les hautes vertus républicaines et
d’honnêtes - mais
pauvres - citoyens qui crient famine, c’est une position
scandaleuse qui mérite d’être analysée.
C'est justement au nom des "hautes valeurs républicaines" qu'il faut accéder à la demande de dignité des défavorisés. Ce n'est pas d'une rupture, mais d'un lien dont on a besoin ici.
C'est justement au nom des "hautes valeurs républicaines" qu'il faut accéder à la demande de dignité des défavorisés. Ce n'est pas d'une rupture, mais d'un lien dont on a besoin ici.
Deux
possibilités :
Soit le président vit dans une
bulle dorée et ignore complètement qu’un grand nombre de ses
concitoyens est à 50€ près – et même à 10 -, auquel cas il
est mal informé et donc inapte
à
être le président de « tous les Français ».
Soit,
-autre option - il est parfaitement conscient et cynique et pose les
bases de ce qu’il voudrait voir devenir une nouvelle idéologie
"républicaine", un peu comme dans 1984 où Big Brother trie le
vocabulaire et réorganise la langue pour qu’une nouvelle forme
de pensée
devienne la bible d’un pays artificiel.
Vous
voyez une troisième solution ? Le débat est ouvert dans les
commentaires, que je publie toujours s’ils ne sont pas insultants.
La
France n’est pas un pré carré où la finance va organiser la vie
autour de ses profits, c’est un peuple lié par des valeurs, -
justement -, qui figurent au fronton de ses édifices :
« Liberté, égalité, fraternité ».
La
liberté, c’est celle de tous, et pas seulement des « premiers
de cordée », qui ne sont d’ailleurs premiers de rien du tout
s’ils
n’emmènent personne à leur suite vers le haut sur la voie du progrès,
c’est aussi la France des modestes et des sans-diplômes, qui ne
sont pas des « riens » comme l’a déjà proféré le vizir de l’Elysée, ainsi
que
je l’ai déjà relevé il y a bientôt un an.
L’égalité,
c’est de reconnaître que la « valeur » d’un citoyen
ne se mesure pas à ce qu’il « produit », mais
éventuellement à « ce qu’il a produit » (les
retraités), et même simplement à ce qu’il apporte en existant,
en faisant valoir son simple droit à la dignité. (SDF, chômeurs,
migrants)….
Et
la fraternité, la grande oubliée de ces
dirigeants qui se comportent en « faux frères » et ne
s’intéressent qu’à leur caste, il faudrait en brandir les
pancartes en tête de tous les défilés.
Même
certains chefs d’entreprise commencent à croire qu’il y a
« l’entreprise » et eux, à la rigueur quelques
collaborateurs dont
ils s’assurent
à grands frais le
dévouement aveugle,
et personne d’autre. Les salaires des esclaves diminuent alors même
qu’augmentent leurs primes, salaires, dividendes et autre
prébendes.
Et même lorsque,
devant un scandale qui enfle trop, ils
les réduisent à grand tintamarre médiatique, il leur en reste
suffisamment pour ouvrir deux écoles et un hôpital.
Le
« summum de la lutte », ce n’est pas, effectivement,
les 50€ des APL.
C’est
de se débarrasser d’un affameur ploutocrate qui n’écoute
personne et veut façonner tout un pays suivant son caprice comme un
enfant organise sa table de soldats de plomb.
D’habitude,
je commence un article en me disant que je serai bref, et j’en
écris des pages que je suis ensuite obligé de couper et d’élaguer.
Là,
je me voyais parti dans de longues diatribes, et j’ai soudain
l’impression qu’en peu de mots, j’ai tout dit.